Saint Augustin : Prophéties du triomphe de Jésus-Christ dans l’Ancien Testament

Restent trois petits prophètes qui ont prophétisé sur la fin de la captivité de Babylone : Aggée, Zacharie et Malachie. Aggée prédit en peu de mots Jésus-Christ et l’Eglise en ces termes :

Voici ce que dit le Seigneur des armées : Encore un peu de temps, et J’ébranlerai le ciel et la terre, la mer et le continent, et Je remuerai toutes les nations; et celui qui est désiré de tous les peuples viendra – Aggée 2 ;7.

Cette prophétie est déjà accomplie en partie et le reste s’accomplira à la fin du monde. Dieu ébranla le ciel, quand Jésus-Christ prit chair, par le témoignage que les astres et les anges rendirent à Son incarnation. Il émut la terre par le grand miracle de l’enfantement d’une vierge; Il émut la mer et le continent, lorsque le Sauveur fut annoncé dans les îles et par tout le monde. Ainsi nous voyons que toutes les nations sont remuées et portées à embrasser la foi. Ce qui suit : « Et Celui Qui est désiré de tous les peuples viendra », doit s’entendre de son dernier avènement; car avant que de souhaiter qu’Il vînt, Il fallait l’aimer et croire en Lui. Zacharie parle ainsi de Jésus-Christ et de l’Eglise :

Réjouissez-vous, dit-il, fille de Sion, bondissez de-joie, fille de Jérusalem, car voici venir votre Roi pour vous justifier et pour vous sauver. Il est pauvre, et vient monté sur une ânesse et sur le poulain d’une ânesse ; mais Son pouvoir s’étend d’une mer à l’autre, et depuis les fleuves jusqu’aux confins de la terre. – Zacharie 9 ;9

L’Evangile nous apprend, en effet, en quelle occasion Notre-Seigneur se servit de cette monture[1], et fait même mention de cette prophétie. Un peu après, parlant à Jésus-Christ même de la rémission des péchés qui devait se faire par Son Sang :

Et vous aussi, dit-il, vous avez tiré vos captifs de la citerne sans eau, par le sang de votre Testament. – Zacharie 9 ;11

On peut expliquer diversement, et toujours selon la foi, cette citerne sans eau; mais, pour moi, je pense qu’on doit entendre la misère humaine, qui est comme une citerne sèche et stérile, où les eaux de la justice ne coulent jamais, et qui est pleine de la boue et de la fange du péché. C’est de cette citerne que le Psalmiste dit :

Il m’a tiré d’une malheureuse citerne et d’un abîme de boue. – Psaume 34 ;2

Malachie, annonçant l’Eglise que nous voyons fleurir par Jésus-Christ, dit clairement aux Juifs en la personne de Dieu :

Vous ne M’agréez point, et Je ne veux point  de vos présents. Car depuis le soleil levant jusqu’au couchant, Mon nom est grand parmi les nations. On Me fera des sacrifices  partout, et l’on M’offrira une oblation pure, parce que Mon nom est grand parmi les nations, dit le Seigneur. – Malachie 1 ;10

Ce sacrifice est celui du sacerdoce de Jésus-Christ selon l’ordre de Melchisédech, que nous voyons offrir depuis le soleil levant jusqu’au couchant, tandis qu’on ne peut nier que le sacrifice des Juifs à qui Dieu dit : « Vous ne m’agréez point, et je ne veux point de vos présents », ne soit aboli. Pourquoi donc attendent-ils encore un autre Christ, puisque cette prophétie qu’ils voient accomplie n’a pu s’accomplir que par Lui ? Un peu après, le même prophète, parlant encore en la personne de Dieu, dit du Sauveur :

J’ai fait avec Lui une alliance de vie et de paix; Je Lui ai donné Ma crainte, et Il M’a craint et respecté. La loi de la vérité était en Sa bouche; Il marchera en paix avec Moi, et Il en retirera plusieurs de leur iniquité. Car les lèvres du grand-prêtre seront les dépositaires de la science; et ils l’iront consulter sur la loi, parce que c’est l’ange du Seigneur tout-puissant – Malachie 2 ;5.

Il ne faut pas s’étonner que Jésus-Christ soit appelé l’ange de Dieu; de même qu’Il est esclave à cause de la forme d’esclave en laquelle Il est venu parmi les hommes, Il est aussi ange à cause de l’Evangile qu’il leur a annoncé; car Evangile en grec signifie bonne nouvelle, et ange, messager[2]. Aussi le même prophète dit encore de Lui :

 Je m’en vais envoyer Mon ange pour  préparer la voie devant Moi, et aussitôt viendra dans Son temple le Seigneur que vous cherchez, et l’ange du Testament que vous demandez. Le voici qui vient, dit le Seigneur et le Dieu tout-puissant ; et Qui pourra supporter l’éclat de Sa gloire et soutenir Ses regards ? – Malachie 3 ;1

On trouve prédit en cet endroit le premier et le second avènement de Jésus-Christ; son premier avènement, lorsqu’il dit : « Et aussitôt le Seigneur viendra dans Son temple », c’est-à-dire dans Sa chair, dont il est dit dans l’Evangile : « Détruisez ce temple, et Je le rétablirai en trois jours[3]» et le second en ces termes : « Le voici qui vient, dit le Seigneur tout-puissant, et qui pourra supporter l’éclat de Sa gloire et soutenir Ses regards? » Ces paroles : « Le Seigneur que vous cherchez, et l’ange du Testament que vous demandez », signifient que les Juifs mêmes cherchent le Christ dans les Ecritures et désirent l’y trouver. Mais plusieurs d’entre eux, aveuglés par leurs péchés, ne voient pas que Celui qu’ils cherchent et qu’ils désirent est déjà venu. Par le Testament, il entend parler du Nouveau, qui contient des promesses éternelles, et non de l’Ancien, qui n’en a que de temporelles; mais ces promesses temporelles ne laissent pas de troubler beaucoup de personnes faibles qui s’y attachent, et qui, voyant les méchants comblés de ces sortes de biens, ne servent Dieu que pour les obtenir. C’est pourquoi le même prophète, pour distinguer la béatitude éternelle du Nouveau Testament, qui ne sera donnée qu’aux bons, de la félicité temporelle de l’Ancien, qui pour l’ordinaire est commune aux bons et aux méchants, s’exprime ainsi :

Vous avez tenu des discours qui Me sont injurieux, dit le Seigneur. Et vous dites: En quoi avons-nous mal parlé de Vous? Vous avez dit : C’est une folie de servir Dieu; que nous revient-il d’avoir observé ses commandements, et de nous être humiliés en la présence du Seigneur tout-puissant? – N’avons-nous donc pas raison d’estimer heureux les méchants et les ennemis de Dieu, puisqu’ils triomphent dans la gloire et dans l’opulence ? Voilà ce que ceux qui craignaient Dieu ont murmuré tout bas ensemble. Et le Seigneur a vu tout cela et entendu leurs plaintes ; et il a écrit un livre en mémoire de ceux qui le craignent et qui le révèrent. – Malachie 3 ;13

Ce livre signifie le Nouveau Testament. Mais écoutons ce qui suit :

Et ils seront Mon héritage, dit le Seigneur tout-puissant, au jour que j’agirai; et Je les épargnerai comme un père épargne un fils obéissant. Alors vous parlerez un autre langage, et vous verrez la différence qu’il y a entre le juste et l’injuste, entre celui qui sert Dieu et celui qui ne le sert pas. Car voici venir le jour allumé comme une fournaise ardente, et il les consumera. Tous les étrangers et tous les pécheurs seront comme du chaume, et ce jour qui approche les brûlera tous, dit le Seigneur, sans qu’il reste d’eux ni branches, ni racines. Mais, pour vous qui craignez Mon nom, le soleil de justice se lèvera pour vous, et vous trouverez une abondance de tous biens à l’ombre de Mes ailes. Vous bondirez comme de jeunes taureaux échappés, et vous foulerez aux pieds les méchants, et ils deviendront cendre sous vos pas, au jour que J’agirai, dit le Seigneur tout-puissant. (Ibid)

Ce jour est le jour du jugement, dont nous parlerons plus amplement en son lieu[4], si Dieu nous en fait la grâce.

Saint Augustin, La Cité de Dieu, Livre 18, Chapitre 35.

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[1] Jean 12 ;14

[2] Angelos, messager, ange, Euangelion, récompense donnée au porteur d’une bonne nouvelle.

[3] Jean 2 ;19

[4] Dans les quatre derniers livres.

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