[Magistère] Pape Clément XIII : In Dominico Agro, instructions sur la foi

Aux vénérables Frères, aux patriarches, primats, archevêques et évêques. Vénérables frères, salut et bénédictions apostoliques.

  1. Pour l’entretien du champ du Seigneur, là où la Divine Providence Nous a placés comme pasteur suprême, il n’est rien qui demande plus de vigilante attention et de travail acharné que de garder le bon grain de la doctrine catholique que les apôtres ont reçu de Jésus-Christ et nous ont transmis. Si, par paresse, une telle mission devait être négligée, l’ennemi du genre humain sèmera l’ivraie pendant que les ouvriers dorment. Ainsi, on y trouvera de la mauvaise herbe, promise aux flammes, plutôt que le bon grain destiné à être monté dans les greniers. Aussi, Saint Paul nous exhorte avec force à protéger la Foi que les saints Nous ont transmise. (1 Hébreux 3) Il ordonna à Timothée de préserver l’alliance sacrée (2 Timothée 1-14), à cause des temps difficiles qui devaient venir (2 Timothée 3-1), des temps où des hommes mauvais et trompeurs parviendraient à s’introduire dans l’Eglise de Dieu (2 Timothée 3-13). Ces fourbes tentateurs useront de leurs artifices et chercheront à infecter les esprits imprudents avec des erreurs hostiles à la Vérité évangélique.
  2. Il arrive que certaines idées indignes soient diffusées dans l’Eglise…ces idées, bien que se trouvant en contradiction les unes avec les autres, conspirent de concert afin de nuire à la pureté de la foi catholique. Il est fort difficile de mesurer prudemment notre propos à l’encontre de tous ces ennemis, car il nous faut agir de telle façon à ne jamais paraitre tourner le dos à aucun d’entre eux, mais plutôt de fermer la bouche et condamner également tous les ennemis du Christ. Toutefois, la gravité de la chose est telle que l’erreur démoniaque, lorsqu’elle a minutieusement maquillé ses mensonges, se revêt d’autant plus facilement de l’apparence de la vérité….par de subtils ajouts ou modifications corrompant le sens des mots et le sens de la foi…[…]
  3. Les croyants, spécialement les plus simples et les moins instruits d’entre eux, doivent être éloignés de toutes sortes de sentiers dangereux sur lesquels ils seraient bien en peine de mettre le pied sans trébucher. Le troupeau ne doit pas être mené en des lieux incertains. De même que les opinions privées, même celles des théologiens catholiques, ne devraient pas leur être proposées. Il serait plus sage que leur soient inculquées les vérités catholiques, caractérisées par leur universalité, leur antiquité et leur harmonie. Aussi, de même que la foule ne peut monter sur la colline (Exode 19-12)sur laquelle descendit la Gloire du Seigneur, sous peine d’être frappée de mort pour avoir vu et franchi cette limite, les pasteurs du peuple doivent établir des frontières autour du troupeau afin que pas un seul mot ne vienne troubler tout ce qui est vraiment nécessaire et utile au salut des âmes. Les croyants doivent obéir à la sagesse apostolique, et ne pas chercher à connaitre plus qu’il n’est nécessaire, mais de savoir avec mesure. (Romains 12-3)
  4. Les papes ont compris la chose. Ils dévouèrent tous leurs efforts pour couper les bourgeons empoisonnés de l’hérésie du moment avec l’épée de l’anathème, mais aussi pour pourfendre certaines idées qui pouvaient non seulement contrevenir au droit des croyants de jouir des fruits de la Foi, mais aussi blesser les âmes des fidèles par la proximité de l’erreur. C’est pourquoi le Concile de Trente condamna ces hérésies qui à cette époque, cherchaient à éclipser la lumière de l’Eglise… [ce concile] exposa la vérité catholique dans une lumière encore plus brillante, et ce fut comme si les nuages de l’erreur avaient été dispersés. Nos prédécesseurs ont estimé que ce saint concile de l’Eglise universelle fut particulièrement prudent dans son jugement et si modéré qu’il s’abstint de condamner certaines idées que certaines autorités ecclésiastiques entretenaient alors, ils [nos prédécesseurs] voulurent préparer un nouveau document avec la coopération de ce saint concile, une œuvre pure de toute erreur, destinée à couvrir toute la doctrine catholique que tout croyant doit connaitre. Ils imprimèrent et distribuèrent ce livre sous le titre de Catéchisme Romain. Bien des aspects de leur entreprise sont dignes de louanges. Dans cet ouvrage, ils ont compilé l’enseignement commun à toute l’Eglise, puis ils proposèrent de faire connaitre directement cet ouvrage aux fidèles par des mots d’une grande éloquence, selon le précepte du Seigneur Jésus-Christ qui enseigna aux apôtres de proclamer dans la lumière ce qu’Il leur avait enseigné dans la confidence (Mathieu 10-27), et de proclamer sur les toit, ce qu’ils avaient appris en secret. Ils se soumirent à l’Epouse du Seigneur, l’Eglise, dont les mots sont : « Dis-moi, ô toi que mon cœur aime, où tu mènes paître tes brebis, où tu les fais reposer à midi.» (Cantique des Cantiques 1-7) Car, là où il n’est pas midi et où la lumière est obscurcie au point que la vérité ne puisse être clairement connue, l’erreur peut facilement être prise pour la vérité à cause de son apparence de vérité… [l’erreur] est ainsi difficilement distinguable de la vérité lorsqu’on se trouve dans les ténèbres. [Les papes] savaient que, comme depuis toujours, il y aurait toujours des gens pour tromper ceux qui cherchent leur nourriture quotidienne, en leur promettant d’appétissants pâturages de sagesse et de connaissance, beaucoup d’entre eux iront en effet dans ces pâturages parce que les eaux dérobées ont meilleur gout et que le pain dissimulé est plus délicieux. (Proverbes 9-17) Aussi, si jamais l’Eglise devait être égarée par des ouailles qui elles-mêmes sont égarées et indécises, sans certitudes dans la Foi, qui passent leur temps à étudier (2 Timothée 3-7) sans jamais atteindre la connaissance de la Vérité, les papes ont exposé que tout ce qui était nécessaire et très utile au salut était clairement et entièrement expliqué dans le Catéchisme romain et communiqué aux croyants.
  5. Mais, bien que ce livre, composé par des remarquables efforts, soit universellement approuvé et accueilli avec les plus grandes louanges, en ce moment même, l’amour des novations l’a presque fait disparaitre des mains des prêtres, inspirant la production de plus en plus de catéchismes qui n’ont rien de commun avec le catéchisme romain. De là, deux périls nous guettent : Le consensus sur la méthode d’enseignement manqua de peu d’être détruit et les membres les plus fragiles parmi les croyants furent scandalisés de découvrir qu’ils n’étaient plus unis par le même langage et les mêmes sujets. D’autre part, des contentions naissent de différentes manières de transmettre la vérité catholique, naissent de l’esprit de désunion, ainsi que de grands désagréments nés de rivalités…tandis que l’un se déclare le disciple d’Appolo, l’autre de Céphas, l’autre de Paul. Nous pensons que rien ne peut être plus fatal à la plus grande Gloire de Dieu que l’amertume de ces comportements déplorables. Rien ne peut être plus nuisible et désastreux pour les fruits dont les croyants doivent pouvoir bénéficier de la discipline chrétienne. Aussi, afin de faire disparaitre ces deux maux de l’Eglise, Nous devons revenir à cette méthode, puisque certains, se considérant comme plus savants, ont insolemment et imprudemment égaré les fidèles pendant un certain temps. Nous pensons que le catéchisme Romain doit à nouveau être fourni aux prêtres de façon à ce qu’ils se détournent de ces idées nouvelles que ni la tradition antique, ni le consentement de l’unanimité ne recommandent, ceci afin de raffermir la foi catholique et les âmes des fidèles dans l’enseignement de l’Eglise, qui est le pilier de la Vérité (1 Timothée 3-15). Afin de rendre ce livre plus accessible et de corriger les erreurs qui eurent pu survenir au cours de sa production, Nous nous sommes assurés que l’exemplaire publié par Notre prédécesseur Saint Pie V en accord avec les décrets du Concile de Trente soit réimprimé à Rome avec le plus grand soin. La traduction en langues vernaculaires qui fut rédigée et publiée par ordre du même Saint Pie V sera réimprimée très bientôt par Nos ordres et sera publiée.
  6. Et puisque Notre vigilance et Notre diligence procureront une aide très appréciable pour éliminer les tromperies des idéologies abominables qui courent à cette époque très difficile pour l’Eglise, et pour rependre et établir la vraie et pure doctrine, il est de votre devoir de veiller à ce que les fidèles l’acceptent. Parce que les papes ont voulu que ce livre soit pour les pasteurs quasiment comme la norme de la foi catholique et de la discipline chrétienne, afin que l’unanimité règne aussi dans la méthode de transmission de la doctrine. Nous vous la recommandons expressément à présent, vénérables frères. Nous vous exhortons fortement de commander que tous ceux qui ont à charge des âmes l’utilisent dans l’instruction des fidèles dans la vérité catholique, afin de préserver l’unité d’enseignement, de charité et l’harmonie des esprits. Car il est de votre devoir de veiller à la sérénité de tous. Enfin, il est le devoir de l’évêque de veiller attentivement à ce que personne de viole les limites de l’unité et de fomente des schismes en agissant avec orgueil dans son propre intérêt.
  7. Si ceux qui ont le devoir d’exposer et d’expliquer ces livres aux fidèles sont d’indignes enseignants, ils prouvent leur inutilité. Il est donc de la plus haute importance que, pour la charge de la transmission de la doctrine chrétienne aux fidèles, vous choisissiez non seulement des hommes munis de la connaissance théologique, mais plus important encore, des hommes connus pour leur humilité, leur charité et leur zèle à sanctifier les âmes. La totalité de la pratique chrétienne ne consiste pas dans l’abondance des paroles, ni dans l’habileté à discourir, ni dans la recherche des éloges et de la gloire, mais da l’humilité vraie et volontaire. Il y a ceux qu’une érudition plus grande élèvent, mais séparent aussi du contact avec la société des autres gens. Plus ils en savent, moins ils apprécient la vertu d’harmonie. La Sagesse elle-même les averti par le Verbe de Dieu : « Ayez du sel en vous-mêmes, et soyez en paix entre vous. » (Marc 9;50) Il est donc nécessaire de posséder le sel de la sagesse pour préserver l’amour du prochain et pour neutraliser les faiblesses. En changeant le zèle pour l’érudition, et l’amour du prochain pour l’irritation envers lui, ils ont un sel sans paix, qui n’est pas un don vertueux, mais une cause de condamnation. Plus ils en sauront, plus bas ils tomberont. L’apôtre Jacques les condamnent par ces mots : « Mais si vous avez dans vos cœurs un zèle amer et un esprit de dispute, ne vous glorifiez point et ne mentez point contre la vérité. Une pareille sagesse ne descend pas d’en haut; elle est terrestre, charnelle, diabolique. Car là où il y a jalousie et esprit de contention, là est le trouble et toute action mauvaise. Alors la sagesse d’en haut est premièrement pure, ensuite pacifique, condescendante, traitable, pleine de miséricorde et de bons fruits, sans partialité, sans hypocrisie. Le fruit de justice se sème dans la paix par ceux qui pratiquent la paix.» (Jacques 3 ; 14-18)
  8. Ainsi, tandis que Nous prions Dieu, dans un esprit contrit et dans l’humilité du cœur, afin d’attirer Son indulgence et Sa miséricorde sur nos efforts pour empêcher toute cause de désagréments aux croyants, et pour assurer que, dans l’obéissance de la paix et dans la charité de l’esprit, nous connaissions, nous louions et glorifions le Dieu unique et Notre Seigneur Jésus-Christ. Nous vous saluons d’une sainte étreinte et Nous communiquons affectueusement Notre bénédiction apostolique sur vous tous et sur les fidèles de vos églises.

Pape Clément XIII, In Dominico Agro, instructions sur la foi, 14 juin 1761

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