Justinien, victorieux, pieux, heureux, illustre, triomphant, toujours auguste ; à Jean, Patriarche et très-saint Archevêque de la ville de Rome. Honorant le siège apostolique et votre sainteté, pour laquelle nous n’avons jamais cessé de faire des vœux, que nous regardons comme notre père, nous nous sommes hâtés de lui donner connaissance de toutes les affaires qui concernent l’état ecclésiastique. Comme nous nous sommes toujours efforcés de maintenir l’unité de votre siège apostolique , et de maintenir les saintes églises de Dieu dans l’état où elles sont aujourd’hui, c’est-à-dire , dans la paix , et exemptes de toutes contrariétés , nous avons engagé tous les prêtres de l’Orient à s’unir et se soumettre à votre sainteté : mais à présent que de nouveaux doutes se sont élevés, quoique sur des choses claires et certaines, et conformes à la doctrine de votre siège apostolique , fermement gardée et professée par tous les prêtres, nous avons cependant cru nécessaire d’en instruire votre sainteté ; car nous ne souffrons pas que les affaires qui naissent au sujet de la religion, quoique simples et non douteuses, soient agitées sans que votre sainteté en soit instruite , elle qui est le chef de l’église, car nous nous efforcerons toujours, comme nous avons dit, d’accroître l’honneur et l’autorité de votre siège.
- Nous faisons donc savoir à votre sainteté que quelques infidèles, hors de la Sainte Eglise catholique de Dieu, ont osé avancer des principes judaïques et apostats sur des points conformes à Votre doctrine apostolique que tous les prêtres ont embrassés, qu’ils respectent et prêchent. Ces infidèles nient que Jésus-Christ soit le Fils unique de Dieu ; qu’Il soit Dieu lui-même et Notre Seigneur incarné, né du Saint-Esprit et de la sainte, glorieuse et toujours Vierge Marie , Mère de Dieu ; qu’Il a été fait homme et crucifié ; qu’Il soit une des personnes de la sainte et consubstantielle Trinité ; qu’on doive L’adorer avec le Père et le Saint-Esprit ; qu’Il soit consubstantiel avec le Père, selon la divinité, et consubstantiel avec les hommes, selon l’humanité ; susceptible de douleurs par la chair, n’en étant pas susceptible par la divinité. En refusant de reconnaître Notre Seigneur Jésus-Christ, Fils unique de Dieu et Notre sauveur, comme une personne de la sainte et consubstantielle Trinité, ils paraissent suivre l’abominable doctrine de Nestorius, qui dit que Dieu a un fils par la grâce, qui est appelé le Verbe de Dieu, et un autre fils appelé le Christ.
- Tous les prêtres de la sainte église catholique et apostolique et les révérends abbés des saints monastères avant reconnu votre sainteté, approuvant l’état et l’unité des saintes églises qui dépendent de Votre siège apostolique, et ne changeant rien à l’état ecclésiastique actuel, confessent et prêchent que Notre Seigneur Jésus-Christ est Fils unique et Verbe de Dieu, né, avant les siècles, de Son Père ; qu’Il est descendu dernièrement du ciel; qu’il a pris chair, et est né du Saint-Esprit et de la sainte et glorieuse Vierge Marie, mère de Dieu ; qu’il a été fait homme et a été crucifié ; enfin, qu’il est une des personnes de la sainte et consubstantielle Trinité ‘, qu’on doit l’adorer et louer avec le Père et le Saint-Esprit. Nous ne reconnaissons point un dieu verbe et un autre dieu christ, mais Un seul et Même qui est consubstantiel avec le Père, selon la divinité, et consubstantiel avec les hommes, selon l’humanité ; passible par la chair, impassible par la divinité : en sorte qu’Il est parfait comme Dieu, et parfait comme homme. Nous admettons la divinité en Une seule substance, et nous confessons ce que les Grecs appellent ὁμοούσιος (consubstantialis). Et puisque Notre Seigneur Jésus-Christ est le Fils unique, Verbe de Dieu, qu’Il est né de son père avant les siècles et les temps ; que le même est dernièrement descendu des cieux ; qu’il a pris chair par le Saint-Esprit et par la sainte, glorieuse et toujours Vierge Marie , mère de Dieu, et qu’il a été fait homme , il est donc proprement et véritablement Dieu : c’est pourquoi nous disons que la sainte et glorieuse Vierge Marie est proprement et véritablement la mère de Dieu, non de ce que Dieu a pris la parole et la naissance d’elle, mais parce qu’il est dernièrement descendu des cieux et qu’il a pris chair et est né d’elle et a été fait homme ; lequel nous croyons et confessons, comme nous avons déjà dit, consubstantiel avec le père , selon la divinité , et consubstantiel avec les hommes , selon l’humanité. Nous croyons de même à ses miracles et à sa passion, qui eurent lieu pendant qu’Il était en chair.
- Nous admettons, ainsi que votre siège apostolique l’enseigne et prêche, quatre saints conciles; 1. celui des 318 saints pères qui s’assemblèrent dans la ville de Nicée ; 2. celui tenu dans cette ville par les saints pères, au nombre de 150 ; 3. celui tenu à Ephèse ; 4. et enfin, celui de Chalcédoine. Tous les prêtres qui suivent la doctrine de votre siège apostolique croient, confessent et prêchent ces choses.
- Nous avons cru nécessaire de donner connaissance à votre sainteté, par les évêques Hypatius et Démétrius, des dénégations méchantes et judaïques faites par quelques moines qui suivent la doctrine abominable de Nestor.
- Nous demandons donc Votre affection paternelle, afin que Vous nous fassiez connaître par Vos lettres, ainsi qu’aux évêques de cette ville et au patriarche Votre frère (qui a écrit lui-même à Votre sainteté, par les mêmes députés, qu’il suivait en toutes choses le siège apostolique de Votre béatitude), que Votre sainteté approuve tous ceux qui croient à ce que nous avons exposé ci-dessus, et qu’elle condamne la perfidie de ceux qui ont osé judaïquement nier la foi légitime. Ainsi l’autorité de Votre siège et l’amour de tous pour Vous augmenteront ; l’unité et la tranquillité des saintes églises seront assurées, quand les évêques apprendront des députés qui vous ont été envoyés, quelle est la vraie doctrine de Votre sainteté. Nous demandons de Votre sainteté qu’elle prie Dieu pour nous, et qu’Elle nous obtienne sa bienveillance. La souscription était ainsi : Que Dieu, ô saint et très-religieux père, Vous donne une longue vie !
Lettre de l’empereur Justinien au pape Jean II, Code Justinien, Livre I, titre premier, point n°8