Elizabeth Grigoryevna Volkonskaya est née à Rome le 19 Octobre 1838 dans la grande famille princière des Volkonsky. Elle est la fille du prince Grigori Petrovitch Volkovsky et de Maria Alexandrovna, fille du comte Alexandre Khristoforovitch von Benckendorff. Elle nait et passe une grande partie de son enfance à Rome, où son père fait partie de la mission russe auprès du Saint-Siège. Très religieuse depuis son enfance, elle est très proche de sa tante, la princesse Zinaïda Volkonskaya, elle-même revenue au catholicisme. Enfant surdouée, elle stupéfiant très tôt son entourage par la vivacité de son intelligence.
En 1859, elle épouse à Genève son cousin, le prince Mikhail Sergevich Volkonsky, lui-même fils du décembriste Sergei Volkonsky. Ce dernier ayant été amnistié en 1856, Elizabeth part s’installer à Saint-Pétersbourg avec son mari. Elle y reçoit de nombreuses grandes figures intellectuelles du XIXe siècle russe, telles que Fiodor Tioutchev, Yakov Polonsky, Alexis Tolstoï ou encore Apollon Maïkov. Tout en étant une mère de famille active et très attentionnée, elle étudie constamment le grec, le latin et la Patristique. Elle se lance notamment dans une vaste étude comparative entre les écrits des pères dans les textes originaux grecs et latins, qu’elle compare avec différente versions en langue russe. Tout en concluant peu à peu à la vérité indéniable de la primauté du siège apostolique romain et de ses doctrines, elle constate aussi que beaucoup de traductions russes des Pères de l’Eglise, comportent de nombreuses distorsions de langages sur ces points précis. Dans le même temps, la princesse a une vie sociale riche ; elle crée différentes œuvres de charité, en particulier la société caritative de Saint-Pétersbourg qu’elle préside depuis sa création en 1868 jusqu’à sa mort, et dont l’esprit s’apparente beaucoup à celui de l’action sociale catholique.
En 1887, elle compile l’ensemble de ses travaux sur la question dans un ouvrage nommé « Sur l’Eglise », publié à Berlin en langue russe, sous son propre nom. Ce livre, totalement méconnu de nos jours et qui ne semble jamais avoir été traduit, a causé un véritable coup de tonnerre dans la hiérarchie de l’église russe. L’un des fils de la princesse, Serge Mikhailovitch (lui aussi passé au catholicisme par sa mère), écrira plus tard dans ses mémoires :
« Même si l’indignation restait formelle, les esprits en avaient été grandement secoués. Ils s’étaient retrouvés devant un adversaire inattendu, incapables de répondre aux preuves sincères et logiques et n’osant toutefois pas livrer d’attaques. Ce fut une vraie tourmente. L’archiprêtre Lebedev déclara au sujet du livre : ‘ce livre a pour auteur une quinzaine de jésuites, seul le nom de la princesse fut utilisé. »
Très influent conseiller de l’empereur Alexandre III et procureur-général du « saint-synode » (donc chef de l’église russe, bien que simple laïc) Constantin Pétrovitch Pobiedonostsev, déclara de son côté que la prince Volkonskaya était désormais « la femme la plus dangereuse de Russie ». Le livre fut naturellement interdit en Russie et un large cercle d’académiques, réunis autour de l’archiprêtre Lebedev et du professeur Katansky publièrent une série de publications destinées à critiquer et réfuter les arguments théologiques de la princesse Volkonskaya, l’accusant également de « manque de patriotisme et de sympathies polonaises ». Il est à noter qu’en 1898, l’excellente princesse rédigea elle aussi une réponse à ces universitaires, sous la forme d’un livre « Tradition de l’Eglise et de la littérature théologique russe : comparaison critique », qui ne fut toutefois publiée qu’après sa mort, par son fils Sergei lui-même.
Dès 1887, date de publication de son premier livre, la princesse avait secrètement réuni autour d’elle un groupe de catholiques à Saint-Pétersbourg. En effet, avant la loi de tolérance religieuse de 1905, il était interdit à tout membre de l’église russe de se déclarer catholique, sous peine d’exil, de confiscation des biens et du droit de propriété (cela pouvait aller jusqu’au défrocage et à l’emprisonnement pour le clergé). Toutefois, le rang princier et le poids politique de sa famille, son mari étant lui-même sénateur et sous-ministre de l’éducation, a probablement protégé la princesse des vexations qu’a pu connaitre par exemple, le père Nicholas Tolstoï à la même époque. Ce dernier était aussi issu d’une grande famille d’aristocrates de Saint-Pétersbourg. Il croise d’ailleurs le chemin de la prince Volkonskaya, ainsi que du grand philosophe Vladimir Soloviev. Ce dernier, qui se convertira définitivement au catholicisme à la fin de sa vie, partageait une grande amitié avec la princesse, qui lui apporta un soutien moral et financier dans ses travaux.
La princesse Elizabeth s’éteint le 15 février 1897 après avoir contracté une pneumonie. Les funérailles sont conduites à Saint-Pétersbourg, dans l’Eglise catholique latine Sainte Catherine d’Alexandrie, par le père Lagrange. Elle repose dans le cimetière familial de Keila-Joa près de Tallin, en Estonie.