Cette semaine, un nouveau « drama » sociétal s’est déroulé à Strasbourg et a enflammé les réseaux sociaux. En résumé, le gérant d’une boutique Geox à Strasbourg a demandé à une jeune employée intérimaire de ne pas porter son voile durant ses heures de travail. Cette dernière ayant refusé, le gérant décide alors d’appeler l’agence intérim pour se plaindre et exiger la fin du contrat. La jeune fille filme la scène et la partage sur les réseaux sociaux, ce qui déclenche évidemment des milliers de réactions sur Twitter et dans les médias, les uns hurlant au racisme systémique, les autres applaudissant le gérant qualifié de résistant héroïque à la charia.
Mon but n’est pas de commenter ce fait divers, qui en tant que tel est sans importance, mais plutôt d’analyser le fait de société qu’il cache.
Commençons par dire que ce gérant est dans son droit d’exiger une certaine tenue vestimentaire pour ses subordonnés, tant que cette exigence reste raisonnable et en ce qui nous concerne, tant qu’il n’exige pas de ses employées de porter des tenues indécentes. Il est évident qu’une femme peut s’habiller de façon parfaitement décente sans avoir à porter le voile.
Il apparaît que le règlement intérieur de Geox impose à ses employés de ne pas porter de couvre-chefs dans l’exercice de leurs fonctions. De plus, on a appris par la suite que la jeune femme en question avait déjà travaillé dans ce magasin sans porter de voile et avait donné entière satisfaction à son employeur. Il semble donc que nous ayons affaire à une histoire insignifiante, à un énième caprice sans importance qui finit par être monté en épingle sur les réseaux sociaux, faisant apparaître une fois de plus les nombreuses fractures sociétales françaises. C’est bien la seule raison pour laquelle nous prenons la peine d’en parler aujourd’hui.
Ajoutons que si ces affaires, apparemment insignifiantes, prennent autant d’ampleur, c’est aussi parce qu’une partie de l’opinion publique est encore traumatisée par les assassinats de Charlie Hebdo ou celui, plus récemment de Samuel Paty. Le vrai drame, c’est que l’opinion publique française ne semble toujours pas capable de comprendre la source du problème et donc d’y apporter une réponse appropriée, parce que deux siècles de Révolution ont fait que les Français ne savent plus comment aborder la question du religieux dans l’espace public.
Nous avons déjà dit par le passé que, contrairement à d’autres, et malgré notre opposition à l’islam en tant que catholiques, nous n’avons rien contre le voile des musulmanes. Plus généralement, nous n’avons rien contre le port du voile tout court. Au contraire. Nous sommes même pour qu’elles puissent le porter dans le milieu scolaire et dans l’administration publique, à condition qu’il soit adapté aux traditions esthétiques françaises. Pour paraphraser Patrick Buisson, nous avons plus de respect pour une femme musulmane voilée qui pratique au moins la modestie naturelle que pour la lolita instagrameuse en mini-jupe.
Cependant, de telles libéralités ne seraient possibles que dans une société française réconciliée avec sa propre identité et c’est ici que se trouve le véritable problème.
Réconcilier la société française implique de la purger de de ses éléments parasitaires, qu’ils soient endogènes ou exogènes. Autrement dit, cette réconciliation de la France avec elle-même, effort absolument nécessaire pour envisager sereinement le futur, ne sera possible que lorsque nous aurons retrouvé un équilibre spirituel, moral et ethnoculturel satisfaisant, ce qui est loin d’être le cas. Malheureusement, nous sommes encore trop peu nombreux à poser le bon diagnostic et à proposer les bonnes solutions, tandis que l’ensemble de la classe politique, à droite comme à gauche, s’enferme encore dans le consensus idéologique qui nous a menés à cette situation de chaos sociétal.
Nous le disons souvent : l’immigration de masse rend l’assimilation et l’intégration absolument impossible. Et puisque l’immigration est devenue une véritable idéologie au sein de la classe dirigeante, le volume des flux migratoires, légaux et illégaux, n’a cessé de croître au fil des années. Plus l’immigration augmente, plus la société se fracture et plus l’assimilation devient impossible. En conséquence de quoi les phénomènes communautaristes violents se multiplient, non seulement à l’encontre de la communauté nationale mais même entre les acteurs de la multiculturalité. J’avais écrit un article à ce sujet il y a plus de 10 ans dans le défunt Lys Noir et nous en avons vu encore tout récemment des exemples, comme l’agression violente d’une collégienne de 13 ans, Samara, tombée dans le coma après avoir été frappée à mort par un groupe de filles qui la harcelait depuis plusieurs années, semble-t-il en partie à cause de prétextes religieux. On peut aussi évoquer le drame qui s’est joué la semaine dernière à Viry-Chatillon, où un jeune adolescent de 15 ans a été battu à mort par quatre garçons qui lui reprochait d’avoir une correspondance immorale avec la sœur de l’un d’entre eux.
Toutes ces nouvelles affaires relancent évidemment le double problème de l’immigration, notamment de l’immigration musulmane, et de l’assimilation, question qui hante la vie publique française depuis maintenant plusieurs décennies.
En réalité, toute politique d’assimilation a été rendue impossible depuis que l’immigration est devenue une idéologie dans le courant des années 1970-80. Idéologie économique pour les néo-libéraux qui voient la société comme une grande entreprise capitaliste dans laquelle n’importe qui peut s’intégrer tant qu’il remplit une fonction économique ; Idéologie « morale » pour les gauchistes qui considèrent quant à eux que les frontières nationales n’existent pas et que la citoyenneté d’un pays s’étend par nature à l’ensemble de l’humanité, surtout lorsqu’il s’agit d’un pays occidental.
Dans les deux cas, nous voyons que l’immigrationisme est le fruit direct de l’idéologie libérale qui conçoit la société comme le fruit d’un contrat social positiviste et qui rejette ainsi le principe même de la société organique. Je sais que certains libéraux classiques protesteront en affirmant que leur doctrine accepte le principe du droit naturel et rejette l’égalitarisme, mais ces 200 dernières années de développement social en Occident suffit à prouver qu’ils vivent eux aussi dans une illusion philosophique qui est sur le point de disparaître.
Comme idéologie, l’immigrationisme (et le multiculturalisme qui l’accompagne) devient alors, par définition, un processus sans limites. Ce qui explique pourquoi, en pleine campagne européenne, Valérie Hayer et Raphaël Glucksmann persistent encore à vanter les mérites de l’immigration, affirmant d’une part que s’opposer à l’immigration est nécessairement la marque d’un esprit intolérant, et d’autre part, que nous n’aurions pas d’autre choix que d’accepter l’immigration de masse si nous voulons sauver notre système de retraite et si nous voulons retrouver la croissance. On voit ici que les arguments gauchistes se marient parfaitement avec les arguments néo-libéraux, précisément parce qu’ils partagent la même métaphysique.
Tel est encore aujourd’hui le consensus idéologique partagé par une bonne partie de la classe politique, alors même que les sondages montrent depuis 20 ans que 70% de Français veulent la fin de l’immigration de masse ; que des dizaines d’études démontrent que l’immigrationisme a des effets socio-économiques extrêmement négatifs ; et que des centaines de statistiques prouvent qu’une partie disproportionnée de personnes immigrées ou issues de l’immigration récente est responsable de délits, de crimes, de viols et de meurtres.
L’autre facteur qui a rendu l’assimilation et l’intégration impossibles dès le départ, c’est aussi le fait qu’il est impossible d’assimiler ou intégrer dans une société qui renie ses racines spirituelles et morales. N’oublions pas que l’immigration de masse, comme phénomène pratique et idéologique, s’est mise en place dans les années 1970 et 1980, c’est-à-dire dans une époque qui a vu le triomphe de la contre-culture postmoderne, la victoire du néolibéralisme et la domination du sécularisme jouisseur et consumériste. Autrement dit, l’immigration de masse a surgi dans une société qui s’efforçait joyeusement d’abandonner son anthropologie profonde sous prétexte de « modernisation » des structures traditionnelles et de « libération » des consciences. Cette société-là était incapable d’anticiper les problèmes qu’elle subit aujourd’hui. Et elle est évidemment incapable de les résoudre tant qu’elle ne renonce pas à ce poison philosophique.
Cette société occidentale en état d’amnésie identitaire est donc incapable d’intégrer, mais elle est aussi incapable de se défendre efficacement contre les effets extrêmes de l’immigrationisme (délinquance communautaire, séparatisme exogène, islamisation, etc.)
Les deux seuls marqueurs identitaires qui restent alors à l’Occident sans Dieu sont le sécularisme et l’identitarisme, que ce soit à gauche ou à droite. Il n’est donc pas surprenant de voir aujourd’hui des discours similaires chez des personnalités aussi diverses que Caroline Fourest, Céline Pina, Eric Zemmour ou Michel Onfray.
Or, justement, l’obstination amorale et séculariste qu’on retrouve encore trop souvent dans les discours politico-médiatiques ne fait qu’exacerber les problèmes posés par l’immigration de masse et la multiculturalité. Le sécularisme n’est pas seulement le refus de soumettre l’ordre social au droit divin : c’est aussi, et par voie de conséquence, le refus de soumettre l’ordre social à la loi naturelle. Et lorsque même les lois naturelles ne sont plus reconnues, nous dit Pie XII, la société finit inévitablement par régresser dans la barbarie. En ayant affaibli considérablement les structures naturelles de la société organique, le sécularisme empêche celle-ci de pouvoir assimiler les immigrés, non seulement lorsqu’ils sont en nombre raisonnable, comme c’était encore le cas au milieu des années 1980, mais plus encore lorsque leur nombre devient insoutenable comme c’est le cas depuis plus d’une vingtaine d’années.
Si le consensus immigrationiste reste fort au sein de la classe dirigeante, l’immigration est un phénomène rejeté par un nombre de plus en plus important de Français, y compris par une partie de l’électorat d’Emmanuel Macron et même par une partie de l’électorat de la gauche socialiste et de l’extrême-gauche. Ceci explique en grande partie la montée en force du Rassemblement National, qui entre-temps, s’est institutionnalisé et a adopté un visage beaucoup plus jeune et séduisant. L’immigrationisme est devenu tellement impopulaire que même une partie significative d’immigrés installés en France dans le contexte de la chute de l’empire colonial, et qui sont désormais grand-parents voire arrière grand-parents, veulent eux aussi « fermer la porte » à cette nouvelle immigration massive, envahissante et illégitime.
Malheureusement, le consensus séculariste et libertaire continue d’être partagé par la quasi-totalité de la classe politique. Depuis les attentats de Charlie Hebdo, nous avons vu émerger une sorte de réaction laïcarde dans le discours politique. Face au problème des manifestations plus ou moins violentes de l’islam, les politiciens, du RN jusqu’au centre-gauche, voire même dans une partie de la gauche radicale, en appellent tous au « sursaut républicain », à la défense impitoyable du principe de laïcité sur l’ensemble du territoire. Par opportunisme ou par conviction, certaines figures de la droite nationale n’hésitent à surenchérir sur le sujet, profitant du fait que la gauche radicale, en particulier les mélenchonistes et les écologistes, ont totalement abandonné le laïcisme à l’ancienne au profit d’une stratégie inter-sectionnelle.
Comme l’a très justement remarqué un jour Geoffroy Lejeune, la laïcité n’est pas le bon outil pour traiter les problèmes posés par l’immigration ou par l’islam, tout particulièrement en matière d’assimilation et d’intégration. Mais ce n’est pas seulement la laïcité que l’on persiste à opposer au multiculturalisme et à l’islamisme. Ce sont aussi les acquis de la contre-culture postmoderne. Même à droite, on hésite pas à soutenir des figures comme la fameuse Mila, sorte de caricature de femme moderne, athée, portant les cheveux courts, s’exposant souvent de façon indécente sur les réseaux sociaux, revendiquant le droit de blasphémer n’importe quelle religion et d’exprimer une sexualité « libre ».
Ainsi, sous prétexte de combattre l’immigrationisme, on en arrive à soutenir sans réserve des blasphémateurs publics. Sous prétexte de combattre l’islamisation de notre société, on fait la promotion des mœurs dégénérées de la révolution sexuelle. Pour ajouter à la confusion, on va jusqu’à présenter le sécularisme et la contre-culture postmoderne comme faisant partie de la culture et de l’identité européenne, alors qu’ils en sont l’antithèse. Et on ira ensuite sur les plateaux de télévision vanter les mérites d’une civilisation judéo-chrétienne dont on méprise en réalité les principes fondamentaux.
De tout ceci, il résulte une véritable confusion identitaire qui est particulièrement problématique pour la droite nationale, laquelle semble être réduite à se servir du poison libéral-libertaire en croyant pouvoir ainsi éliminer le poison multiculturel. Loin de régler le problème, cette méthode ne fait qu’exacerber les tensions sociétales tout en rendant toujours incertaine la victoire politique qui permettrait enfin de conduire une vraie politique d’assimilation et une politique de rééquilibrage ethnoculturel. D’ailleurs, on voit que ce climat délétère pousse plutôt les bons éléments à s’expatrier tandis que les racailles et les immigrés illégaux ou illégitimes ont plutôt tendance à s’inscruster dans notre société pour profiter pleinement du désordre et de la permissivité qui y règnent.
Car enfin, même si demain on décidait d’expulser tous les musulmans ou même toute personne suspectée d’avoir ne serait-ce qu’une goutte de sang extra-européen, la vérité est qu’on se trouverait toujours dans une société sans Dieu, sans morale et sans ambition universelle.
Fort heureusement, chacun, même Mila, peut constater aujourd’hui que la laïcité est en train de mourir à petit feu. Elle vit peut-être même ses dernières années. Nous pensons évidemment qu’il faut plutôt se réjouir de ce développement, à condition bien sûr d’apporter une alternative à ce système moribond, une alternative qui ne peut qu’être spirituelle et morale, ce qui implique donc de ne pas se complaire encore dans le nihilisme séculariste.
Le sécularisme, qui n’est que l’autre nom de la laïcité et du libéralisme philosophique, a été une rupture radicale avec l’anthropologie européenne traditionnelle. C’est une anomalie qui doit disparaître et qui va inévitablement disparaître.
La laïcité, telle qu’elle a été conceptualisée dans l’époque contemporaine, n’a jamais existé nulle part dans l’histoire humaine. La Rome païenne ne connaissait aucune distinction entre pouvoir religieux et politique. L’Europe chrétienne distinguait les deux, mais ne les séparait pas. Notre sociétés modernes, nées des révolutions libérales et socialistes des deux derniers siècles, ont prétendu retrouver le véritable esprit antique, débarrassé des dogmes, de la morale et des superstitions chrétiennes, en épousant un libéralisme philosophique et religieux qui n’a jamais vraiment existé sous cette forme dans le monde païen. Seul le christianisme, prouvant ainsi sa véracité, a fait comprendre au monde que le pouvoir spirituel et temporel devaient être distingués, mais pas séparés.
En effet, aucune société ne peut survivre sans un ordre moral et sans normes religieuses capables d’unir les populations dans une vision éthique bien déterminée et vers un futur commun. Le laïcisme ne fut pas un progrès, il fut une régression vers ce que le monde païen avait produit de pire. Le laïcisme ne fut pas une évolution historique naturelle, mais une rupture anthropologique radicale.
Et, de fait, toutes les dérives idéologiques de la contre-culture freudo-marxiste et libérale-libertaire découlent entièrement de l’idéologie séculariste occidentale.
Il n’est donc pas surprenant que l’obstination de notre société à s’accrocher à ce mythe laïciste se traduise aujourd’hui par une crise générale d’autorité, illustrée en l’espèce par les manifestations de sauvagerie de jeunes racailles allochtones ou par l’influence du gauchisme au sein de la jeune bourgeoisie urbaine.
Mais alors, quelle est la solution ? Ceux qui veulent appliquer les méthodes des sociaux-démocrates danois, c’est à dire moins d’immigration tout en ne corrigeant en rien les défaillances institutionnelles et anthropologiques de notre temps, sont à mon humble avis des gens qui ont déjà plusieurs trains de retard et qui manquent de sérieux. Il faut bien sûr stopper l’immigration. Il faut bien sûr procéder à l’expulsion d’un certain nombre d’indésirables. Mais il faudra beaucoup plus que cela pour restaurer l’ordre social et l’anthropologie française. Beaucoup se refusent encore à l’inévitable car ils ne veulent pas renoncer aux jouissances coupables de la postmodernité. Il faudra pourtant qu’ils s’y fassent. Le retour de l’ordre social chrétien est inéluctable. Nous sommes les seuls capables de remettre de l’ordre dans ce pays, au moins sur le plan des principes directeurs.
Et fort heureusement, grâce au retour de plus en plus important du catholicisme au sein des jeunes générations de Français, je pense que nous nous dirigeons petit à petit vers une situation où de plus en plus de citoyens vont comprendre que l’assimilationnisme laïcard et l’intégration néo-libérale ne sont pas les solutions, mais les sources même du problème. Petit à petit, les intelligences vont s’ouvrir aux sages solutions de l’intégralisme catholique, à condition que nous soyons au rendez-vous.
Pour retrouver un équilibre ethno-culturel viable et pour redonner ses lettres de noblesse à la vraie notion de citoyenneté, il faudra certainement procéder à des dénaturalisations et à des expulsions exemplaires. L’avantage des réseaux sociaux c’est que nous pouvons désormais facilement identifier toutes les personnes qui manifestent une haine authentique contre la culture française et européenne et qui n’ont donc rien à faire ici. Il ne faudra pas non plus oublier de punir les politiciens, magistrats, journalistes et autres personnalités publiques qui sont les premiers responsables du chaos multiculturel dans lequel nous vivons.
Mais pour parvenir à ce rééquilibrage ethnoculturel qui nous permettra à la fois de définir un modèle d’intégration clair et efficace, tout en nous débarrassant des éléments indésirables et illégitimes, il nous faudra impérativement établir les principes de la foi chrétienne au sommet de notre constitution et de nos lois organiques. Ce n’est pas un choix, c’est une nécessité.