Finalement, les milieux conservateurs du novus ordo ont fini par se confronter à la réalité, du moins jusqu’à un certain point. Je veux parler ici de la correction filiale qui a été envoyée à Bergoglio cet été et publiée il y a quelques semaines. Ce document relativement long accuse Bergoglio d’avoir promulgué des hérésies dans Amoris Laetitia, cette encyclique qui autorise notoirement, aussi bien la fornication que l’adultère. La traduction latine de ce titre signifie : « la joie de l’amour », mais certains esprits sarcastiques l’ont appelée « la joie de l’adultère ». Ce document contient en effet d’abominables hérésies et représente tout simplement une autre pierre -de taille- à l’édifice du novus ordo. De notre point de vue, la promulgation d’hérésies par la hiérarchie novus ordo n’est nullement une nouveauté. Ces choses durent depuis plus de 50 ans. Jean-Paul II a promulgué des hérésies dans son catéchisme de 1979, lorsqu’il déclare dans son encyclique relative, qu’il faut enseigner aux enfants que les religions non-catholiques sont des voies de salut :
Dans ce contexte, il est extrêmement important de faire une présentation correcte et loyale des autres Églises et communautés ecclésiales dont l’Esprit du Christ ne refuse pas de se servir comme de moyens de salut” (Catechesi Tradendæ, no. 32, http://w2.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/apost_exhortations/documents/hf_jp-ii_exh_16101979_catechesi-tradendae.html)
Voici une hérésie complète et contraire au dogme selon lequel hors de l’Église, il n’y a pas de salut. Si vous affirmez qu’il existe des voies de salut hors de l’Église catholique, vous vous placez en contradiction directe avec le dogme catholique. Or, Jean-Paul II lui-même n’affirmait rien de nouveau. Il ne faisait que citer les textes de Vatican II. D’ailleurs, il cite précisément le texte du concile dans la citation que je viens de vous rapporter. La vérité, c’est que les religions non-catholiques, parce qu’elles peuvent effectivement affirmer quelques vérités, sont certes capables d’informer leurs fidèles sur ces vérités, qui peuvent, en retour, alerter ces fidèles sur les vérités de la Foi catholique. Ainsi, un protestant dévot, s’il lit attentivement sa bible protestante, peut comprendre l’évidence claire de La Présence Réelle de Jésus-Christ dans la Sainte Eucharistie. De là, ce protestant est en mesure de conclure qu’il se trouve dans une fausse religion et peut être amené vers l’Église catholique.
Le fait que des religions non-catholiques affirment certaines vérités, pour la plupart volées ou plagiées sur la religion catholique, ne fait pas de ces religions des « voies de salut ». Si le protestant, doutant ou niant les vérités de sa religion protestante, ne cherche pas et ne prie pas pour la vraie religion, si cette personne échoue ou refuse de devenir catholique par la grâce de Dieu, elle va en enfer.
Un moyen de salut se définit comme étant toute sorte d’agent doté du pouvoir divin d’enseigner, de diriger et de sanctifier le genre humain. Cet agent, ce sacerdoce, est unique dans le monde : il n’est nul autre que l’Église catholique. Les autres religions ne sont pas des « églises », mais seulement diverses sortes d’entités schismatiques, hérétiques ou païennes, et n’ont aucune capacité à amener les hommes au Paradis. En réalité, ces fausses religions sont des voies de damnation : si une personne en suivait toutes les doctrines, elle serait fatalement conduite devant des aberrations dogmatiques et morales très graves et elle y perdrait son âme. L’hérésie est un poison dont il suffit d’une seule goutte dans un verre d’eau pour le rendre mortel. Donc, les non-catholiques sont conduits à la foi catholique en dépit de leur fausse religion, et non grâce ou à cause de leur fausse religion. Les non-catholiques doivent réaliser la tâche très difficile de déceler la vérité au milieu de la tourbe de mensonges de leur fausse religion. Jean-Paul II, bien qu’il fut un incontestable hérétique, n’en demeure pas moins l’une des idôles des conservateurs novus ordo. Ceci parce que Jean-Paul II a pu dire parfois des choses exactes. Il était contre l’avortement, bien qu’en son temps, beaucoup de « catholiques » déclaraient publiquement être en faveur de l’avortement, notamment beaucoup de nonnes. Il était contre la contraception, bien que la contraception parmi les « catholiques » devint pandémique sous son « pontificat ».
Il peut donc semble surprenant qu’après 50 ans de Vatican 2, les conservateurs novus ordo s’éveillent soudainement pour remarquer qu’il se passe quelque chose d’étrange à Rome. Le document qui a été présenté à Bergoglio contenait à la fois de bons et de mauvais éléments de critique.
Concernant l’aspect positif de la « correction filiale ». Il n’y a qu’un seul aspect positif à cette correction : c’est que les conservateurs novus ordo admettent finalement que la hiérarchie novus ordo enseigne universellement et publiquement des hérésies. Et ce n’est pas rien, dans la mesure où ce document ne fait que confirmer ce que nous avons dit et répété depuis des années. En effet, dans ce document, ils n’accusent pas Bergoglio d’hérésie privée. Ils ne l’accusent pas de professer l’hérésie à sa seule échelle individuelle. Ils l’accusent d’avoir promulgué l’hérésie à toute l’Église. En affirmant cela, ils donnent la preuve positive que la hiérarchie novus ordo n’est pas la hiérarchie de l’Église catholique, car il est impossible à la hiérarchie de l’Église catholique de professer et d’enseigner publiquement l’hérésie.
L’Église catholique est assistée par le Christ dans tous ses enseignements universels, lois et disciplines. L’Église catholique ne peut en aucune manière promulguer à l’Église universelle des enseignements mauvais, pernicieux, des lois ou des disciplines qui contrediraient la doctrine catholique. Et ceci est le cas, même lorsque ce qui a été universellement promulgué n’a pas la marque de l’infaillibilité. En d’autres termes, le magistère autoritaire, mais non-infaillible de l’Église catholique – ce qui est typiquement le cas pour la plupart des encycliques- pourrait potentiellement contenir une erreur, mais jamais une erreur pernicieuse [à effet négatif ou à intention malicieuse] ou une hérésie. Car nous sommes tenus, sous peine de péché mortel, de croire religieusement même aux enseignements universels non-infaillibles. Et l’objet de ce pieux assentiment ne peut en aucun cas être une erreur qui serait contraire à la foi ou à la morale.
Il me semble qu’il n’existe dans le passé, pas le moindre exemple d’une erreur dans cette catégorie d’enseignements non-infaillibles. Ces conservateurs novus ordo accusent donc Bergoglio d’enseigner une doctrine contraire à l’enseignement moral de l’Église, ce dernier étant nécessairement infaillible, étant basé sur la Révélation et sur l’enseignement universel de l’Église catholique. Or, l’Église catholique condamne l’adultère comme péché mortel. Il s’agit là d’un enseignement universel de l’Église, qui fait partie du magistère ordinaire universel, qui est lui, infaillible. De plus, les auteurs de la correction filiale accusent Bergoglio d’enseigner une hérésie contre l’ordre moral. De façon pertinente, ils trouvent l’origine de cette erreur dans le modernisme et le protestantisme, et de là, ils accusent indirectement Bergoglio d’adhérer à ces hérésies. Il est impossible que l’Église promulgue universellement une doctrine qui contredit son propre magistère. Le Cardinal Franzelin, puissant théologien du XIXe siècle et principal architecte de la théologie du Concile de Vatican en 1870 a dit ceci :
« Le saint siège apostolique à qui la garde du dépôt de la foi a été divinement confiée,ainsi que la fonction conjointe et le devoir de diriger l’Église universelle pour le salut des âmes, a le pouvoir d’ordonner des propositions théologiques devant être tenues pour vraies dans la mesure où ces propositions sont connectées à des questions théologiques, de même d’ailleurs que ce siège apostolique a le pouvoir de condamner les propositions théologiques qui ne doivent pas être tenues, non seulement lorsqu’il y a intention de déclarer infailliblement une vérité par un jugement définitif, mais même sans qu’il y a une intention de définir, dans la mesure où est prise en compte la nécessité ou l’intention d’assurer la défense de la doctrine catholique, que ce soit en général ou dans des circonstances particulières. Dans ce type de déclarations, bien qu’il n’y s’y trouve pas de vérité dite infaillible, dans la mesure où dans ces déclarations, il n’y a pas intention de définir, ces déclarations sont néanmoins infailliblement sûres. Cette sûreté consiste aussi bien en une certitude objective de la doctrine déclarée -que ce soit en général ou pour des circonstances particulières- qu’en une certitude subjective, dans la mesure où tous doivent accepter cette certitude sans crainte, de même que personne n’a le droit de refuser d’accepter cette certitude sans risquer de commettre une violation de la soumission due au magistère divinement constitué. (De Divina Traditione et Scriptura, Rome, 1882, page 127-128
Le cardinal enseigne ici une doctrine qui est universellement enseignée par tous les théologiens et qui a été confirmée par le pape Pie XII, à savoir que l’infaillibilité de l’Église n’est pas seulement restreinte aux dogmes définis, mais s’étend aussi à l’approbation ou la condamnation de propositions théologiques qui touchent de près ou de loin aux dogmes et à la morale de l’Église. Cela est aussi le cas même lorsque le pape ou bien une congrégation du Vatican, spécialement déléguée par le pape, promulgue des enseignements sans l’intention d’en faire un jugement définitif. A de tels enseignements, nous ne sommes certes pas tenus par l’assentiment de la foi, mais par ce qu’on appelle l’assentiment religieux, c’est à dire l’obéissance de notre intellect à l’Église dans la mesure où celle-ci est l’enseignante universelle des matières sacrées. Cette assentiment religieux est absolument sans risque, dans la mesure où l’Église, par l’assistance divine, ne peut en aucun cas promulguer à l’ensemble des croyants une doctrine qui contredirait l’enseignement moral catholique, qui doit être tenu de fide.
C’est pourquoi personne ne peut affirmer que les erreurs contenues dans cet abominable document [amoris laetitia] ne seraient que les opinions personnelles de Bergoglio, comme s’il donnait une simple interview à un journaliste. Logiquement, de ce fait, les auteurs de la correction filiale affirment que Bergoglio a effectivement promulgué des hérésies dans Amoris Laetitia. Or, la conclusion qu’il faut tirer ici, par tous les principes de la doctrine catholique concernant l’infaillibilité de l’Église, est que la hiérarchie qui a promulgué ce document n’est pas la hiérarchie catholique. Une authentique hiérarchie catholique ne peut pas faire cela, car elle bénéficie de l’assistance perpétuelle du Christ.
Les effets négatifs de la correction. Le premier aspect négatif de la correction est que ses auteurs se bornent uniquement aux hérésies promulguées dans ce document. Comme je l’ai déjà dit souvent, Bergoglio n’est pas le problème. Vatican 2 est le problème. Bergoglio est seulement un fruit de la broussaille de Vatican 2, il ne fait que porter logiquement les fruits de tous les principes de ce concile diabolique. L’erreur fondamentale de Vatican 2 est l’affirmation de la primauté de la conscience devant l’enseignement de l’Église. Cette doctrine infecte et destructrice du dogme est contenue dans le principe de l’œcuménisme. Affirmer que les sectes hérétiques sont des voies de salut revient à affirmer que Dieu n’a aucun intérêt pour la vérité et que ce qui compte vraiment est votre expérience personnelle de Dieu, et non la Vérité concernant Dieu. Le pape Pie XI, dans son encyclique Mortalium Animos en 1928, a déclaré qu’une telle erreur conduit à l’abandon de la religion divinement révélée. Il faisait référence à ceux qui considèrent toutes les religions comme étant plus ou moins bonnes et louables, puisqu’elle manifestent et expriment toutes de façon différente, ce sentiment qui « nous est inné à tous ». Il écrit :
« En vérité, les partisans de cette théorie s’égarent en pleine erreur, mais de plus, en pervertissant la notion de la vraie religion ils la répudient, et ils versent par étapes dans le naturalisme et l’athéisme. La conclusion est claire: se solidariser des partisans et des propagateurs de pareilles doctrines, c’est s’éloigner complètement de la religion divinement révélée. »
Dans le système moderniste, ce qui donne de la « valeur » à la religion est en fait le produit de votre conception intérieure de Dieu. Les dogmes objectifs ne comptent alors pour rien ; ils sont à peine l’expression commune des expériences religieuses. Par conséquent, l’œcuménisme est la doctrine qui découle du principe selon lequel la conscience à la primauté sur la doctrine. Amoris Laetitia est pleine de ces principes. N’est-ce pas au moyen du discernement que les couples fornicateurs ou adultères réalisent qu’ils font quelque chose de mal ? Ici, c’est la conscience avant la loi. Or, la vraie notion de conscience est que la conscience applique la loi. La conscience ne fabrique pas la loi. La loi vient de Dieu. La conscience l’applique. « Tu ne commettras point d’adultère. » Les conservateurs novus ordo, en conséquence, sont à côté de la plaque, s’ils ne comprennent pas que les dérives doctrinales de Bergoglio sont tout simplement l’application des principes fondamentaux de Vatican 2.
Le second aspect négatif de la correction est justement qu’il s’agit d’une correction. Les auteurs de ce documents se sont aveuglés eux-mêmes au point de croire qu’il est possible à des laïcs ou même à des prêtres et des évêques de corriger le pape. Avec futilité, ces conservateurs citent l’exemple de Saint Paul corrigeant Saint Pierre, alors que cette correction n’était pas en rapport avec la doctrine, mais avec le comportement. Les auteurs rapportent aussi le cas des théologiens de l’Université de Paris citant l’erreur de Jean XXII concernant la Vision Béatifique après la mort. Mais cette analogie n’est pas tenable, car Jean XXII n’en parlait que comme théologien privé et n’a jamais imposé ses erreurs à l’enseignement universel. Dans le cas de Bergoglio, nous parlons d’hérésies promulguées à toute l’Église. Pour les raisons que j’ai déjà cité, tout la nature du problème s’en trouve changée, puisque désormais, c’est la question de l’infaillibilité de l’Église qui est en cause, et non seulement les hérésies personnelles de Bergoglio. Une correction implique deux problèmes évidents :
1. Une correction signifie que nous ne pouvons pas faire confiance à l’enseignement du pape.
2. Que nous devrions plutôt faire confiance à l’enseignement des correcteurs.
En effet, quel besoin d’avoir un pape si ce dernier peut être sujet aux « corrections » de « correcteurs » auto-proclamés ? Qui assistera ce comité de correcteurs ? Le Saint Esprit ? Où est-il fait mention d’un tel comité de correcteurs, dans la Sainte Écriture ou dans la Tradition ?
En conséquence, cette notion de « correction » est profondément incorrecte et ruine la notion de l’autorité de l’Église. Cette idée de correction a des relents de gallicanisme, de jansénisme et le fébronianisme, trois erreurs intimement liées et qui affirment que les décisions doctrinales du Saint Siège sont sujettes à l’approbation et au consentement des croyants. Or, qui est l’interprète légitime de la Sainte Écriture et de la Tradition, sinon le pape ? Qui a le dernier mot, sinon le pape ? Écartez ce principe, et vous ruinez l’Église toute entière.
Le troisième aspect négatif de cette correction est qu’elle risque d’être tenue pour une solution contre le problème que représente Bergoglio. En résumé : le « pape » promulgue une hérésie. Un groupe de gens le corrigent. Le problème est résolu. Au contraire ; l’idée de corriger les papes sur des matières doctrinales s’oppose radicalement à l’autorité d’enseignement de l’Église. Le seul remède à un « pape » qui promulgue des hérésies est que les cardinaux et évêques novus ordo se convertissent d’abord à la foi catholique, puis lancent une accusation formelle d’hérésie contre le « pape ». Si ce dernier refuse d’abjurer ses hérésies, on devra alors tenir le siège apostolique comme vacant et envisager d’élire un nouveau pape. Toutefois, ils devront alors élire quelqu’un qui devra répudier Vatican 2 et ses réformes, et non seulement répudier les hérésies de Bergoglio. C’est la seule façon pour que ce problème soit résolu. Mettre en place un système de « correction » de « papes « hérétiques, élaboré par des correcteurs auto-proclamés implique qu’il est très possible qu’un pape catholique promulgue des hérésies à l’Église entière et qu’il serait normal que des correcteurs auto-proclamés sauvent la situation. Cela voudrait dire que l’infaillibilité de l’Église repose sur un comité de correcteurs autoproclamés.
Dans pareil cas, pourquoi aurions-nous besoin d’un pape et pourquoi ne pas juste nous contenter du comité des correcteurs ? Les conservateurs novus ordo, toutefois, ne supportent pas l’idée de la vacance du siège. Ils la détestent tant qu’ils préfèrent adopter la position objectivement hérétique de corriger un « pape ».
A tout le moins, ce que nous pouvons dire de cette correction est qu’elle est un pas dans la bonne direction. Les conservateurs novus ordo ouvrent les yeux petit à petit, dans une certaine mesure, leurs tentatives de faire passer des hérésies pour de l’orthodoxie ayant échoué. Ils auront de plus en plus de mal à nier la conclusion sédévacantiste. Car, toute personne dotée de bon sens peut comprendre qu’un « pape » qui promulgue des hérésies ne peut être un vrai pape. Comment défendre l’infaillibilité de l’Église devant un protestant, par exemple, lorsqu’on affirme dans le même temps que bien que Bergoglio promulgue officiellement et universellement des hérésies, l’Église [la secte novus ordo] est néanmoins infaillible dans ses enseignements universels ? Comment soutenir alors que l’infaillibilité est en fait garantie par un comité de correcteurs auto-proclamés ? La réponse du protestant pourrait être : « Donc, Martin Luther avait raison au final ! »
Toute la doctrine catholique, la théologie et le bon sens indiquent que le siège apostolique est vacant. Prions pour que les conservateurs novus ordo étudient et comprennent les réalités de Vatican 2 et quelle conclusion en tirer.
Monseigneur Donald Sanborn, le 18 octobre 2017