Dans un précédent article, nous avions évoqué l’un des épisodes les plus marquants des tout débuts de la révolution moderniste en France en vous racontant l’histoire du festival « Rock in the Cathedral » qui se tint dans la cathédrale de Reims le 13 décembre 1974, sur l’initiative du clergé apostat de cette époque.
Aujourd’hui, nous souhaitons vous raconter l’histoire des origines de ce qu’on appelle, dans la secte moderniste, la « danse liturgique », à savoir l’introduction de danses au cœur de la liturgie du rite Paul VI.
En effet, depuis la clôture du concile de Vatican 2, cette pratique s’est assez largement répandue dans les cathédrales et les églises occupées par le clergé moderniste.
Par le passé, nous avions rapporté sur le Fide Post plusieurs de ces spectacles (car c’est ainsi qu’il faut les qualifier) qui se tiennent régulièrement dans les messes Paul VI. Par exemple, à l’occasion de la consécration d’une église moderniste au Luxembourg en 2002.
Ou encore ici, pour la célébration de la « Pâques » de 2013 dans une paroisse moderniste californienne.
Et bien souvent, ces danses sont aussi l’occasion d’introduire carrément des rites païens, comme ce fut le cas pour « l’ordination » d’un prêtre moderniste à Rodez en 2017.
Et qu’on ne s’imagine pas, comme certains naïfs le pensent, qu’il s’agit là de simples « abus liturgiques » isolés, puisque la haute hiérarchie moderniste est elle-même friande de ce genre de choses, à commençer par M. Bergoglio :
Il existe tellement d’exemples qu’il nous serait évidemment impossible de tous les lister ici. Pour ceux que cela interesse, il existe des chaines YouTube uniquement consacrées à cela.
Mais pour prouver que ces phénomènes ne sont en rien des « abus liturgiques » du rite Paul VI, voyons ensemble quels sont les fondements doctrinaux de ces pratiques.
La danse liturgique, une innovation introduite par Vatican 2
Certains conciliaires, ignares ou aveugles, s’imaginent encore parfois que ces pratiques sont à classer dans la catégorie des « abus liturgiques ». Pour eux, ces pratiques ne seraient que de déplorables abus de certains clercs. Une telle approche du phénomène relève ou bien d’une profonde naïveté, ou bien d’une profonde ignorance. Ou d’une pure mauvaise foi.
Premièrement, la « danse liturgique » découle tout simplement des directives du concile Vatican 2 en matière de réforme liturgique. Du point de vue conciliaire, il ne s’agit donc pas d’abus, mais tout simplement d’une application des « libéralités » apportées par les textes mêmes des imposteurs duovaticanistes.
On lit ainsi dans la constitution Sacrosanctum Concilium de 4 décembre 1963 :
Pour promouvoir la participation active, on favorisera les acclamations du peuple, les réponses, le chant des psaumes, les antiennes, les cantiques et aussi les actions ou gestes et les attitudes corporelles. – Sacrosanctum Concilium, n°30
Deuxièmement, les danses liturgiques découlent également de l’optionnalisme intrinsèque au rite Paul VI, déjà annoncé au points 34 et 63 de Sacrosanctum Concilium et conçu précisément afin de permettre aux célébrants une grande latitude dans l’organisation et l’aménagement des aspects cérémoniaux intérieurs et extérieurs de la « messe » elle-même.
Tout ceci explique pourquoi, contrairement à ce que certains naïfs pensent, il n’y a pas de possibilité de « bien dire » la messe Paul VI, tout simplement parce que sa nature est telle qu’elle est soumise aux désidératas des célébrants ou des ordinaires locaux, sous prétexte de s’adapter « aux lieux et aux circonstances », comme on le lit encore dans Sacrosanctum Concilium :
Mais, comme en différents lieux et en différentes circonstances, il est urgent d’adapter plus profondément la liturgie…L’autorité ecclésiastique… considérera avec attention et prudence ce qui, en ce domaine, à partir des traditions et du génie de chaque peuple, peut opportunément être admis dans le culte divin. Les adaptations jugées utiles ou nécessaires seront proposées au Siège apostolique pour être introduites avec son consentement. – Sacrosanctum Concilium n°40
Ils seront adaptés à la capacité de compréhension des fidèles et, en général, il n’y aura pas besoin de nombreuses explications pour les comprendre. – Sacrosanctum Concilium n°34
Certes, on pourra dire que Sacrosanctum Concilium demandait aussi que les rites manifestent « une noble simplicité » (Sacr. Conc. n°34), mais tout ceci étant laissé au subjectivisme typique de l’esprit moderniste, la « noble simplicité » ou l’adaptation du rite « à la capacité de compréhension des fidèles » justifie naturellement, chez les conciliaires, le fait d’introduire dans le rite toutes sortes de pratiques mondaines, impies et dégénérées sous prétexte de mieux vouloir exprimer le culte à l’intelligence du monde contemporain. Belle insulte à l’intelligence du peuple de Dieu !
Dans l’esprit moderniste, comme il convient, cela revient évidemment à introduire l’esprit du monde dans le culte, et non pas le contraire. Telle était explicitement la prétention de Sacrosanctum Concilium, véritable œuvre du démon, qui n’hésitait pas à déclarer que dans la liturgie catholique (la vraie), « se sont introduits des éléments qui correspondent mal à la nature intime de la liturgie elle-même, et des parties devenues inadaptées » (Sacr. Conc. n°21).
Pire encore, sous prétexte de vouloir revenir à la simplicité des rites antiques (ce qui était l’une des justifications typique des modernistes), Sacrosanctum Concilium affirme avec une audace incroyable que :
Les hymnes… seront rendus à leur forme primitive, en supprimant ou en changeant tout ce qui sent la mythologie ou s’harmonise mal avec la piété chrétienne. – Sacr. Conc. n°93
Ainsi, Sacrosanctum Concilium sous-entend de façon impie qu’il existe dans le Très Saint Rite de la Messe, des éléments qui « sentent la mythologie » ou « s’harmonisent mal avec la piété chrétienne ».
De telles assertions sont rigoureusement condamnées par le Concile de Trente qui déclare :
Si quelqu’un dit que les cérémonies, les vêtements et les signes extérieurs que l’Église catholique utilise pour la célébration de messes, incitent à l’impiété, plutôt que n’officient la piété : qu’il soit anathème. – Concile de Trente, Session 22, canon 7
Et en ce qui concerne les danses liturgiques et autres innovations infernales introduites par Paul VI, tout ceci va naturellement à l’encontre de tout ce que le Magistère a pu enseigner à propos de la dignité requise pour la cérémonie du culte. Ainsi, le pape Clément V, au Concile de Vienne, déclara :
Certains, autant clercs que laïcs, surtout lors de la vigile de certaines fêtes, alors qu’ils devraient s’adonner à la prière dans les églises, ne craignent pas de danser dans celles-ci et dans les cimetières qui s’y rattachent, et parfois de chanter des chansons et de perpétrer de nombreuses insolences, ce dont proviennent parfois par la suite des délits inconvenants et variés, et par quoi l’office de l’Église est souvent perturbé, pour l’offense de la majesté divine et le scandale de la population qui s’y trouve. – Pape Clément V, Concile de Vienne, Décret n°22
La chose fut également condamnée avec vigueur par le pape Eugène IV au Concile de Bâle-Florence :
Dans certaines églises, à l’occasion de certaines festivités au cours de l’année, se tiennent diverses pratiques scandaleuses. Certains y organisent des comédies masquées ou théâtrales, d’autres y organisent des danses pour hommes et femmes, invitant les gens à l’amusement et à la bouffonnerie. D’autres y préparent des plats et des banquets. Ce saint synode tient ces abus en détestation. Il interdit aux ordinaires, aussi bien qu’aux diacres et recteurs des églises, sous peine de privation de tout revenu ecclésiastique pendant trois mois, d’autoriser ces sortes de frivolités, de même que les marchés et autres foires, dans les églises, qui sont des maisons de prière, de même que dans les cimetières. Ils doivent punir les transgresseurs par des censures ecclésiastiques et par d’autres sanctions juridiques. Ce saint synode décrète que toute coutume, tout statut ou privilège qui n’est pas en conformité avec ces décrets, est vain, sauf s’il ajoute de plus fortes condamnations. – Pape Eugène IV, Concile de Bâle, Session 21, 9 Juin 1435
Dans le même ton, citons aussi les décrets de la 22e session du Concile de Trente, ou encore le pape Pie XII dans Musicae Sacrae, où il déclarait :
La musique liturgique doit être sainte. Elle ne doit pas admettre en son sein tout ce qui sent le profane, ni admettre que pareille chose se glisse dans les mélodies où cela est exprimé. – Pape Pie XII, Musicae Sacrae
Voyons à présent les justifications générales apportés par les modernistes, mais aussi les oppositions de certains conciliaires aux danses liturgiques.
Justifications générales des modernistes
Rappelez-vous tout d’abord que la propagande moderniste, afin de justifier les doctrines de Vatican 2 et les réformes liturgiques, prétendait vouloir « ouvrir l’Eglise » au monde, comme si l’Eglise catholique, qui a par le passé converti d’innombrables âmes aux quatre coins du monde, ne s’était pas suffisamment ouverte à une infinité de cultures et de civilisations.
De plus, l’Eglise, dans tous les âges, a toujours pratiqué une sage méthode d’inculturation. On voit nettement que les modernistes conciliaires ont cherché à manipuler cette sage pratique pour justifier, non pas une inculturation, mais une pure dénaturation du culte. Ajoutons aussi que les fruits pourris de la révolution de Vatican 2, à savoir l’apostasie de millions d’âmes dans le monde, ou au minimum, l’infusion du relativisme et du pluralisme religieux dans les masses jadis catholiques, témoignent suffisamment de l’inanité des prétextes utilisés par les destructeurs.
Les modernistes prétendaient aussi vouloir ramener le rite à une soi-disant simplicité antique qui se serait perdue au fil des âges. Tout ceci n’était que mensonge, puisque l’antiquité du rite latin traditionnel, celui de Saint Pie V, n’a jamais fait l’objet du moindre doute, sauf de la part d’ennemis de l’Eglise comme les hussites ou les protestants.
De plus, les sous-entendus impies que nous lisons dans Sacrosanctum Concilium attaquent non seulement la divine dignité des cérémoniaux du rite latin traditionnel, mais également l’intelligence des fidèles, comme si ces derniers, même les plus modestes, n’avaient pas été capables de comprendre et de suivre le rite traditionnel depuis 2000 ans.
D’ailleurs, l’histoire montre que ceux qui tirent de telles idées avant Vatican 2 n’étaient nullement des « gens du petit peuple », mais au contraire, des hérétiques disposant de grandes connaissances théologiques, tels les John Wyclif, les Jean Huss, les Cramner et autres Martin Luther.
Enfin, les prétentions antiquaristes de Sacrosanctum concilium prouvèrent d’elles-mêmes les intentions non-catholiques des révolutionnaires modernistes, puisque cette réforme, au lieu de ramener le rite à une prétendue simplicité antique, introduisit au contraire non seulement des éléments invalidant le rite Paul VI, comme nous l’avons déjà démontré, mais introduisit également des pratiques cérémonielles tout à fait impies et dégradantes, comme les danses liturgiques, pratiques qui ont toujours été condamnées par le magistère comme nous allons le voir.
Certains modernistes défendent la catholicité des danses liturgiques en citant le fameux passage de 2 Samuel 6 ; 14, dans lequel on voit le Roi David dansant devant l’arche d’alliance. Or, cet argument est parfaitement fallacieux et jamais l’Eglise n’a interprété ce passage pour justifier l’introduction de danses dans le rite. Jamais nos ancêtres en religion, dans l’ancien Israel, ne dansaient pendant le rite dans le Temple de Jérusalem. De même, jamais les chrétiens du Nouvel Israel ne se livrèrent à de pareilles choses.
Au contraire, les danses liturgiques sont plutôt l’apanage des fausses religions : on les retrouve tout d’abord chez les païens, chez les hindous, on les retrouve aussi chez certaines sectes musulmanes (les fameux derviches tourneurs du soufisme), on les retrouve également dans certaines dénominations protestantes modernes, ou encore dans le judaïsme talmudique.
Jamais de telles choses ne furent pratiquées, ni dans la loi mosaïque, ni dans l’Eglise catholique.
Oppositions et confusions au sujet des danses liturgiques chez les conciliaires
Comme nous l’avons suggéré plus haut, un certain nombre de conciliaires de tendance plutôt conservatrice, considèrent les danses liturgiques comme tout à fait non-catholiques. En cela, ils ont tout à fait raison.
Mais là où ils se trompent, ou du moins, là où ils font face à d’insolubles contradictions, c’est lorsqu’ils s’imaginent pouvoir trouver une condamnation nette et franche de ces pratiques par leur hiérarchie moderniste. Or, nous l’avons vu, les danses liturgiques découlent des textes mêmes de Vatican 2, et plus spécifiquement de l’optionnalisme intrinsèque du rite Paul VI.
Et ces confusions infernales se retrouvent mêmes dans les quelques allusions à la controverse, que l’on peut trouver chez divers membres de la curie moderniste, comme le père Ratzinger ou encore le père Arinze.
Ainsi, les conciliaires conservateurs citent souvent le P. Ratzinger dans son livre « The Spirit of the Liturgy » (2000), dans lequel celui-ci se livra à une brève, mais assez pertinente analyse du phénomène, affirmant que « la danse n’est pas une forme d’expression de la liturgie chrétienne » et ajoutant tout aussi justement que certains gnostiques et docétistes tentèrent déjà de les introduire au 3e siècle. N’est-il pas alors curieux que ces pratiques soient désormais si courantes au sein du clergé moderniste ?
Le Père Francis Arinze, alors préfet de la Congrégation du Culte Divin, critiqua plus nettement encore les danses liturgiques en affirmant :
Jamais la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements n’a publié de document affirmant que la dance était approuvée à la messe…La tradition de l’Eglise latine ne connait pas la pratique de la dance. Il s’agit d’un phénomène que les gens ont introduit au cours des 10 ou 20 dernières années. – P. Arinze, in Cardinal Responds to Questions on Liturgy, AB, Octobre 2003
Il y a de nombreux problèmes avec cette assertion. Premièrement, comme on le verra plus loin dans l’article, les danses liturgiques en tant « qu’expression des prières de la messe » furent introduites dès 1967 lors de l’inauguration de la cathédrale de Liverpool, à l’instigation de l’archèvêque moderniste local.
Deuxièmement, les affirmations de Ratzinger et d’Arinze sont contredites par les textes de Vatican 2, par l’optionnalisme du rite Paul VI, mais aussi par une publication officielle de cette même Congrégation pour le Culte Divin, publiée en 1975 sous le titre « The Religious Dance – An Expression of Spiritual Joy ».
Ce document, dont on peut lire un extrait pertinent ici, tente à la fois de justifier des expressions spirituelles de la danse (dans un cadre catholique) dans certaines cultures, tout en considérant que la chose ne peut pas être acceptée dans le monde occidental en raison des associations profanes généralement attachés à la danse.
Nonobstant cet argument, amené de façon brouillonne et très discutable, l’extrait conclut cependant en affirmant que « si la proposition en faveur de la danse religieuse en Occident devait être soutenue, il faudra prendre garde à ce qu’elle trouve place hors de la liturgie et dans des espaces qui ne soient pas strictement liturgiques ».
Ainsi, plongés dans leurs contradictions, modernistes radicaux et conciliaires conservateurs sont contraints de créer la distinction entre « traditions culturelles indigènes » et danses « introduites dans la célébration de la liturgie ».
Or, il va de soi que cette distinction est vaine et qu’elle ne peut convenir qu’au subjectivisme moderniste. En réalité, l’inculturation n’a jamais et ne pourra jamais être un prétexte pour introduire des « traditions indigènes » sous formes de danses dans le cadre cérémoniel extérieur ou intérieur au culte.
Ensuite, comme vu dans l’introduction, il existe de très nombreux hauts cadres de la hiérarchie moderniste bien connus pour pratiquer ou avoir pratiqué eux-mêmes ces choses, à commencer par Bergoglio. De la France au Brésil, en passant par l’Australie, l’Afrique et les U.S.A., ces choses sont pratiquées communément depuis la fin du concile, sans condamnation aucune de la part de l’église moderniste.
D’autre part, on pourrait étendre l’exposition de ces contradictions, ou plutôt de cette hypocrisie. En effet, on ne voit pas en quoi les danses africaines, lesquelles sont souvent bien peu modestes, seraient plus légitimes dans le cadre du culte Novus Ordo que les danses occidentales. Dans un cas comme dans l’autre, la chose devrait être moralement inacceptable, sauf à considérer (comme le font implicitement les modernistes) que les mœurs des catholiques africains seraient naturellement plus basses que celles des Occidentaux.
Ensuite, et surtout, l’optionnalisme et le collégialisme respectifs du rite Paul VI et de la hiérarchie moderniste, rendent dans les faits inopérantes toutes les tentatives de condamner plus ou moins radicalement la pratique de la danse liturgique. De fait, comme doivent l’admettre le média conciliaire Adoremus, jamais les « papes » de Vatican 2 ne condamnèrent explicitement ces pratiques. Bien au contraire, ils y ont eux-mêmes participé publiquement :
…Les danses en procession sont coutumières en certains pays et peuvent être des formes légitimes d’inculturation dans la liturgie de ces régions. Ce genre de danses rituelles a été introduit dans plusieurs liturgies papales au cours des dernières années, notamment dans le cadre d’évènements liés à la culture africaine ou asiatique. – in Adoremus, On liturgical dance, 31 Décembre 2007
Ainsi, dans un Responsum ad dubium publié par la Congrégation pour le Culte Divin, daté du 10 septembre 2012, il est affirmé, en réponse à un paroissien qui se questionne à propos des danses liturgiques dans son église locale :
La loi liturgique du rite romain ne prévoit pas l’utilisation de danses ou de pièces théâtrales au sein de la liturgie sacrée, à moins qu’une législation particulière ait été établie par la conférence épiscopale et confirmée par le Saint Siège. Toute autre pratique doit être considérée comme un abus.
Cependant, ces pratiques peuvent être utiles hors de la liturgie sacrée, dans le cadre de la catéchèse et de l’évangélisation, pourvu qu’elles soient placées de façon appropriées sous la direction de l’évêque et de son clergé. – Anthony Ward, Sous-Secrétaire, Prot. n. 544/12/L
Ainsi, les danses liturgiques dans le rite moderniste est potentiellement acceptable, pourvu qu’elle ait l’assentiment de la « conférence épiscopale » et du Vatican occupé, et de fait, elle se pratique partout, y compris en Occident, avec la participation zélée des évêques et cardinaux Novus Ordo. Ci-dessous, l’influent et jamais-condammné « cardinal » Schoenborn durant une très dansante « messe des jeunes », l’une des nombreuses variantes du rite Paul VI :
De plus, on apprend par cette note que les danses liturgiques sont considérées comme également utiles « dans le cadre de la catéchèse et de l’évangélisation ».
En bref, nous ne trouvons ici que confusions et contradiction, comme il convient. Rien de tout ceci n’est évidemment catholique.
Tout ceci étant dit, découvrons à présent l’une des premières manifestations, ou plutôt l’une des premières applications de la révolution moderniste en ce qui concerne les fameuses danses liturgiques.
« The Drama of the Mass », la première représentation officielle d’une danse liturgique
La première manifestation connue de ce phénomène survient au mois de mai 1967, avant même la mise en place officielle de la liturgie de Paul VI. En effet, comme le sait, dès après le concile, une période « expérimentale » (Intérim) fût inaugurée afin de déjà préparer l’esprit des catholiques à accepter ce « vent d’air frais dans l’Église ».
Vent putride en réalité. On sait quels en furent les résultats : les catholiques fidèles entrèrent en résistance. Quant aux autres, ils apostasièrent en masse ou se conformèrent à l’indifférentisme et au relativisme, tant doctrinal que moral et liturgique de l’esprit du concile.
La première danse liturgique ne fut pas introduite par quelque prêtre un peu « zinzin » dans une obscure paroisse progressiste d’une banlieue rouge.
Non. Elle fut introduite en grande pompe par la haute hiérarchie moderniste elle-même à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle cathédrale du Christ-Roi à Liverpool.
À la tête du comité d’organisation de l’évènement se trouvait Mgr. George Beck, archevêque moderniste de Liverpool, assisté de Mgr. Harris, Mgr. T.G. McKenna, Mgr. Cyril Taylor ou encore du père Richard Wright de l’ordre des bénédictins. Pour ceux qui souhaiteraient savoir comment Mgr. Beck justifiait la tenue de l’indigne spectacle que nous allons voir plus bas, vous pouvez lire ici son discours d’ouverture de l’évènement.
Comme on le sait, la révolution moderniste fut totale. Nouvelle doctrine, donc nouvelle liturgie, mais aussi nouvelle architecture. La construction de la nouvelle cathédrale métropolitaine de Liverpool débuta en 1962 pour s’achever en 1967.
Pour la petite histoire, le projet de construction de la cathédrale remontait à la seconde moitié du 19e siècle, étant donné que le nombre croissant d’immigrants irlandais catholiques dans la ville rendait nécessaire l’édification d’une église suffisamment grande. C’est le grand architecte Edward Pugin qui en réalisa la première ébauche. La suite du projet fut confiée à Sir Edwin Lutyens, puis à Albert Scott.
Cependant, hélas, la réalisation des plans de la cathédrale actuelle fut confiée en 1959 à Sir Frederick Gibbert, un urbaniste dont les œuvres médiocres, de style corbuséen, étaient évidemment diamétralement opposés aux styles néo-gothiques et néo-romans des précédents projets.
De fait, la cathédrale actuelle ressemble à une sorte de gigantesque vaisseau spatial. Toute faite de béton, équipée d’un toit en aluminium et de vitraux en fibre de verre, son agencement est circulaire et les bancs de l’assistance sont disposés en forme concentrique, tandis que l’autel Novus Ordo est placé en plein milieu. L’endroit pourrait aussi bien être un batiment de l’O.N.U., une église luthérienne ou un temple maçonnique.
Comme c’est souvent le cas avec les bâtiments de style « contemporain », l’édifice a été soumis dès le départ à de nombreux et couteux défauts de construction.
Le 17 et 21 mai 1967, la cathédrale moderniste fut inaugurée par la tenue de deux « messes chorégraphiées » dans le cadre de l’évènement intitulé « Drama of the Mass ».
Comme le nota sans s’en rendre compte un journaliste du Liverpool Echo en commentant l’évènement, ce titre exprimait parfaitement le caractère fictionnel et théâtral typique des messes Paul VI.
Sur le site qui commémore l’évènement, on apprend que :
Peu de temps après le concile Vatican 2, durant l’été 1967, il se tint deux « premières mondiales » à Liverpool », toutes deux incluses dans le programme des célébrations inaugurales de la cathédrale métropolitaine du Christ-Roi à Liverpool, sous la direction de Bill Harpe.
Ce furent les deux premières « messes chorégraphiées » (sur une musique de Francesco Cavalli), dans lesquelles les prières de la messe étaient non seulement amenées à la vie par les musiciens et les chanteurs, mais également par une troupe de danseurs. Ce fut également la toute première « messe électronique » dans laquelle les prières de la messe était fixées par la musique électronique de l’artiste Pierre Henry.
Les danseurs utilisèrent leur virtuosité afin d’exprimer les prières de la messe sous forme de sculptures kinétiques, de tableaux animés et d’images vivantes.
La chorégraphie cherchait à honorer à la fois les cieux, un attribut associé au ballet, mais également la terre, un attribut associé à la danse contemporaine.
Pour les amateurs de musique électro-rock expérimentale des années 70, vous pouvez découvrir quelques extraits de la musique de Pierre Henry ci-dessous. Cet extrait assez connu exprime toute l’atmosphère culturelle de l’époque :
Toujours selon le site commémoratif, on apprend que l’évènement mobilisa pas moins de 40 danseurs venus de plus de 10 pays différents, 50 musiciens et 80 chanteurs. Selon le site, « c’était la première fois qu’une production théâtrale tenait lieu d’inauguration d’une cathédrale, à l’intérieur de celle-ci ».
L’évènement lui-même couta la bagatelle de 50.000 Livres Sterlings de l’époque, ce qui, compte tenu de l’inflation, équivaut à un peu moins d’un million de Livres Sterlings en 2021. Bel exemple de la « noble simplicité » moderniste !
Ci-dessous, quelques photographies de la messe choréographiée de Mai 1967. On peut en trouver bien d’autres sur le site mentionné plus haut.
Pour preuve de l’état d’esprit des clercs modernistes de l’époque, on retrouve dans la brochure de présentation de l’évènement une description assez fidèle :
L’art et l’architecture chrétienne ont toujours été des expressions de la foi chrétienne. Les grandes cathédrales gothiques d’Europe reflètent la théologie et l’esprit de leur temps, de même que les œuvres des grands peintres chrétiens. Les églises de la Renaissance réflètent encore un autre aspect de l’architecture chrétienne.
La nouvelle cathédrale métropolitaine de Liverpool a été construite avec le même but et dans le même esprit que ces réalisations des siècles passés. Elle cherche à exprimer pour l’époque moderne, ce qui fut réalisé par les grands architectes et artistes du passé.
Plus loin dans la brochure, les organisateurs ne craignent pas d’affirmer, en suivant les mensonges de Sacrosanctum Concilium, que :
Les cérémonies liturgiques [de l’inauguration, ndt] seront suivies d’un programme musical et artistique centré sur la cathédrale, et dont les parties seront une complète et originale expression de l’art chrétien sous une forme moderne, et cependant reliée à l’esprit et au culte des temps passés. Cette œuvre, « The Drama of the Mass », complètera la messe traditionnelle, orchestrale et chantée (l’agencement de la messe traditionnellement utilisé par les compositeurs à travers les siècles) par une mise en portrait des prières, non seulement sous une forme musicale, mais aussi sous une forme visuelle.
On lit plus loin, dans le sommaire de la même brochure, que :
La messe chorégraphiée sera, simplement et uniquement, un enrichissement et une extension du chœur et de l’orchestre traditionnels de la messe, en une expression de la messe en termes visuels et musicaux dans l’église elle-même.
Les prières de la messe seront exprimées en images chorégraphiées : images d’adoration, de souffrance, de douleurs, de gloire et d’espérance ; exprimées en danses, qui seront simples, magnifiques et modernes.
Dans une revue de presse du journal « The Universe », on apprend que « le clergé de l’archidiocèse qui assista à la représentation du 25 mai éclata dans une salve d’applaudissement à la fin de la messe de Cavalli ».
Telle était l’atmosphère qui régnait à époque parmi une grande partie du clergé qui, hier encore, était catholique, et désormais totalement acquis à l’esprit de ce monde.
Parmi le clergé catholique qui vit clair dans la révolution en cours et qui réagit dès la clôture du concile, on peut citer le courageux Père Gommar de Pauw, qui en aout de cette même année 1967, écrivit une lettre d’avertissement à Paul VI en personne.
Dans cette lettre, il dénonce déjà toute l’opération de subversion en cours, le saccage de la messe, le saccage des églises et des ornementaux eux-mêmes, tout ceci mis en place de façon zélée par le clergé progressiste. Déjà, le père De Pauw déplore :
Nos églises n’ont plus rien de catholiques, ni dans l’apparence, ni dans l’atmosphère, ni dans la fonction. Des tables, semblables à des établis de bouchers ou à des tables à repasser, ont remplacé nos autels, et semblent davantage en phase avec les directives de la réforme protestante du 16e siècle.
Notre musique polyphonique et grégorienne a été rejetée au profit de sons et d’instruments parfois empruntés aux milieux décadents de ces jeunes animaux humains.
Un nombre croissant de catholiques, jadis peu suspicieux, réalisent soudainement que, comme nous l’avions prédit il y a deux ans de cela, ils sont poussés, d’abord de façon subtile, puis par des changements de plus en plus audacieux dans la liturgie, vers le rite anthropocentrique de la fraternité universelle, expression des concepts existentialistes et panthéistiques d’une religion mondiale illuministe, préparant la voie vers un gouvernement mondial de type communiste.
À ce moment-là, le Père De Pauw s’adressait encore à Paul VI comme s’il était un vrai pape et semblait convaincu que ce dernier était trompé et manipulé par son entourage.
Quelques années plus tard, les ouvrages du R.P. Saenz Y Arriega démontreront que loin d’être un manipulé, Paul VI était lui-même le manipulateur hérétique, en conséquence de quoi il ne pouvait pas être un pape légitime.
C’est dans cette atmosphère de terrible confusion et spécifiquement en réaction à la révolution liturgique que naquit la résistance catholique fidèle à la tradition de toujours. Il fallait vraiment avoir la foi au milieu de cette horrible révolution.
Je suis toujours impressionné de la qualité de vos articles. Que Dieu vous bénisse et merci beaucoup.
Merci à vous pour ce gentil message. Que Dieu vous garde !
Bonjour,
D’une part, ces clercs ne veulent pas que le christianisme catholique valorise et véhicule des éléments, notamment liturgiques, constitutifs de toute une contre-culture, cohérente, éclairante, exigeante, pertinente, libératrice et responsabilisante, face aux erreurs sur Dieu et face à l’esprit du monde, et c’est manifestement très important à leurs yeux.
Certes, l’Eglise catholique n’est pas et n’a pas à être une contre-société, car si l’Eglise catholique était une contre-société, pour le coup, elle serait une secte, au sens propre du terme, qui méconnaîtrait le principe d’après lequel elle doit être dans le monde sans être du monde.
En revanche, la foi catholique, elle, est une contre-culture, face aux dynamiques culturelles dominantes ou officielles, ou encore médiatiquement correctes, inhérentes au monde contemporain, et c’est encore plus vrai depuis le milieu que depuis le début du XX° siècle.
D’autre part, les mêmes clercs ou, en tout cas, certains d’entre eux, ont une conception de la liturgie d’après laquelle celle-ci peut et même doit contribuer à « mettre de l’ambiance », pour satisfaire les fidèles, ou pour correspondre à telle conception dominante des aspirations des fidèles.
Ainsi, il apparaît de plus en plus clairement, notamment dans le cadre du pontifical actuel, que les années 1960-1970 ont comporté une très grande part de « lavage de cerveau » collectif intra-ecclésial, et qu’ils n’est pas anodin ni innocent que des clercs se positionnent, encore aujourd’hui, comme les continuateurs de ceux qui ont procédé à ce « lavage de cerveau », ou à ce « lessivage » des conceptions et des conduites catholiques, en matière dogmatique et en matière liturgique.
Enfin, il n’est pas toujours facile de comprendre ce que veulent vraiment certains évêques, mais il est souvent possible, au contact de célébrations diocésaines porteuses de festivisme narcissique, bien plus sentimental que théologal, de comprendre ce que ces évêques acceptent, et du coup il est assez facile, par contraste, de comprendre ce que les mêmes évêques refusent, dans les domaines de la célébration et de la contemplation.
Bonne journée.
Un lecteur.