Saint Fidèle naquit à Sigmaringen, petite ville d’Allemagne voisine de la Suisse. Son éducation fut soignée, même brillante, et ses vertus étaient si appréciées de ses condisciples, qu’ils l’appelaient le Philosophe chrétien. Dès lors il s’approchait souvent des sacrements, visitait et soignait les malades dans les hôpitaux et passait des heures entières au pied des autels, dans une intime conversation avec Jésus-Christ. Il exerça plusieurs années la profession d’avocat à Colmar, en Alsace, et s’y fit remarquer par sa loyauté, sa haine du mensonge et la sagesse de ses plaidoyers; il mérita le surnom d’Avocat des pauvres.
Bientôt pourtant la Lumière divine lui fit comprendre qu’il était difficile d’être en même temps riche avocat et bon chrétien: aussi il quitta sans hésiter le monde, où il eût fait bonne figure, pour se retirer chez les Capucins de Fribourg; il y prit l’habit en 1612, à l’âge de trente-cinq ans. Les premières années de sa vie religieuse, d’abord remplies de consolations, furent bientôt éprouvées par de rudes et persistantes tentations de doutes sur sa vocation. Des doutes, il eut la prudence de les confier au guide de son âme, qui le rassura et lui dit de prier Dieu avec ferveur pour connaître Sa Volonté définitive. Dieu lui rendit dès lors la force et la paix; il fit vendre tous ses biens, dont il distribua le prix en bonnes œuvres, et dépouillé de tout, il se réjouit d’être désormais un véritable enfant de saint François. Il se félicitait souvent depuis de l’heureux échange qu’il avait fait avec Dieu : « J’ai rendu, disait-il, les biens de la terre, et Dieu me donne en retour le royaume du Ciel ! »
Fidèle ajoutait aux mortifications de la règle bien d’autres mortifications. Les meubles les plus pauvres, les habits les plus usés étaient l’objet de son ambition ; les haires, les cilices, les ceintures armées de pointes de fer, les disciplines, suppléaient au martyre après lequel il soupirait; l’Avent, le Carême, les vigiles, il ne vivait que de pain, d’eau et de fruits secs : « Quel malheur, disait-il, si je combattais mollement sous ce Chef couronné d’épines ! »
Lorsqu’il fut devenu prêtre, ses supérieurs l’envoyèrent prêcher, et ses succès furent tels, que la congrégation de la Propagande le choisit pour aller évangéliser les Frisons, envahis par le protestantisme. Son zèle fut celui d’un apôtre, sa vie sainte et austère était une prédication si éloquente, qu’elle convertit beaucoup plus d’âmes que les sermons et les raisonnements. Parmi des sectaires furieux, il était chaque jour exposé à la mort. Le martyre vint enfin couronner ses vœux et ses mérites. Plusieurs protestants, par trahison, s’emparèrent un jour de lui, et le transpercèrent à coups de poignards.
Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l’année, Tours, Mame, 1950.