En préambule, nous citerons un passage de la bulle Auctorem Fidei du pape Pie VI, publiée en 1786. Paroles de sagesse du magistère qui condamnait les propositions du Concile de Pistoie. Le passage stigmatise les propos ambivalents des « novateurs ».

« Mais de peur que des esprits obstinés ne prissent occasion, soit de la confrontation des passages quoique faite avec le plus grand soin, soit de l’examen des sentiments, de se livrer à des incriminations injustes; voulant prévenir un reproche calomnieux qu’ils tiennent, peut-être, déjà tout prêt, nous avons cru devoir prendre le parti fort sage qu’ont employé plusieurs de nos plus Saints Prédécesseurs ainsi que les plus graves Prélats, et même des Conciles Généraux, comme l’attestent d’illustres exemples qui nous ont tracé, dans cette conduite pleine de précaution et de prudence, la marche à suivre en pareilles circonstances. Ils connaissaient l’artifice insidieux que mettent en œuvre les Novateurs pour réussir à tromper : ces perfides, pour ne pas choquer les oreilles Catholiques, s’appliquent le plus souvent à couvrir, sous une enveloppe trompeuse de paroles, les pièges qu’ils tendent, afin qu’à l’aide des divers sens dont elles sont susceptibles, l’erreur cachée s’insinue plus doucement dans les esprits, et qu’une doctrine vraie en elle-même étant corrompue par une addition légère en apparence, ou par un changement inaperçu des confessions de foi qui devaient opérer le salut conduisent à la mort d’une manière, pour ainsi dire, insensible. (…)Si donc, on vient à pécher ici en ce point, on ne peut pas, pour se justifier, recourir frauduleusement à cette excuse qu’on a coutume d’apporter, à savoir, que les passages trop durs qui sont échappés se trouvent expliqués dans un meilleur sens, ou même corrigés en d’autres endroits : comme si cette liberté effrontée que l’on se donne de dire tour à tour le oui ou le non, ou même de se contredire, quand on le juge expédient à sa cause (méthode qui fut toujours la ressource astucieuse et trompeuse des Novateurs pour insinuer l’erreur), n’accusait pas l’intention de tromper, bien plutôt qu’elle n’en justifiait; comme si les gens simples surtout qui tomberont sur tel ou tel endroit du Synode exposé aux yeux de tous en langue vulgaire, avaient toujours présents les autres passages disséminés auxquels il faudrait aussi faire attention; ou comme si, même en tenant compte de ces autres passages, chacun était capable de les expliquer les uns par les autres, de manière à ne courir aucun danger d’erreurs, ainsi que le prétendent vainement ces mêmes Novateurs! Artifice souverainement funeste, sans nul doute, pour insinuer l’erreur. Célestin, notre Prédécesseur, l’avait autrefois découvert, par sa pénétration, dans les lettres de Nestorius, Évêque de Constantinople, et en avait fait l’objet du reproche le plus sévère : car ce grand pontife poursuit le fourbe dans ses faux-fuyants, l’atteint et le saisit, découvre son venin dans ce flux de paroles, où enveloppant des vérités dans des choses obscures, puis mêlant ensuite les unes avec les autres, il se réservait de pouvoir confesser ce qu’il avait nié, ou nier ce qu’il venait de confesser. Pour prévenir ces artifices trop souvent renouvelés dans tous les âges, la voie la plus sûre qu’on a trouvée a été que, pour éclaircir les propositions où, sous l’enveloppe de l’ambiguïté, les Novateurs cachent cette diversité dangereuse et suspecte de sens, on notât le sens pervers qui renfermait l’erreur et qui était opposé au sens Catholique. »

Ainsi nous prévenons par avance les défenseurs du novateur Bergoglio : qu’ils ne s’avisent pas d’aller prendre dans l’encyclique des passages qui pourraient sembler orthodoxes, car ils ne feraient que confirmer que nous avons là les preuves de la manœuvre classique des hérétiques qui mêlent toujours le faux au vrai. Qui plus est les actes en disent plus longs que les mots et on cherche en vain une quelconque rectitude et la moindre clarté chez Bergoglio.

Les oppositions dialectiques sont une marque de cette pensée gnostique propre aux novateurs modernistes. Ainsi, des vérités viennent en opposition avec des erreurs pour aboutir à un perpétuel mouvement vers des synthèses de plus en plus révolutionnaires et chaotiques.

Qu’en est-il de ce chapitre : « Les ombres d’un monde fermé » ?

Il part du constat que « des rêves (…) se brisent ». Il s’agit de la construction Européenne, de l’intégration Latino-Américaine (sans doute l’Association latino-américaine d’intégration (ALADI)) et d’autres formes d’intégration supranationales non désignées, à l’instar de ce qui existe sur le continent Africain par exemple. En bref, le rêve mondialiste.

« Mais l’histoire est en train de donner des signes de recul » ; tour à tour, il passe en revue les nationalismes, les conflits anachroniques, la perte du sens social. C’est toujours le même refrain de « la montée des réactions » et des « populismes ».

Face à ces périls, Bergoglio propose plusieurs solutions :

Le culte de la conscience historique :

« Chaque génération doit faire siennes les luttes et les acquis des générations passées et les conduire à des sommets plus hauts encore. C’est là le chemin. Le bien, comme l’amour également, la justice et la solidarité ne s’obtiennent pas une fois pour toutes ; il faut les conquérir chaque jour. »

Pour cela il faut sauvegarder sa conscience historique et savoir qu’« un moyen efficace de liquéfier la conscience historique, la pensée critique, la lutte pour la justice ainsi que les voies d’intégration, consiste à vider de sens ou à instrumentaliser les mots importants. Que signifient aujourd’hui des termes comme démocratie, liberté, justice, unité ? Ils ont été dénaturés et déformés pour être utilisés comme des instruments de domination

Donc, nous avons là un appel à s’inspirer des sources nauséabondes de la pensée révolutionnaire, au lieu de la promotion d’un ordre social chrétien. Pour paraphraser la sentence bien connue des communistes : « La démocratie ne fonctionne pas car il n’y a pas assez de démocratie ».

On n’est pas loin de la conscientisation marxiste.

L’internationalisme :

« Il nous faut constituer un ‘‘nous’’ qui habite la Maison commune », telle est la devise. En filigrane, la sauvegarde de la planète selon la vision des altermondialistes. Bergoglio revient sur cet internationalisme en notant plus tard que grâce au COVID19 :

« Plaise au ciel que tant de souffrance ne soit pas inutile, que nous fassions un pas vers un nouveau mode de vie et découvrions définitivement que nous avons besoin les uns des autres et que nous avons des dettes les uns envers les autres, afin que l’humanité renaisse avec tous les visages, toutes les mains et toutes les voix au-delà des frontières que nous avons créées ! »

L’immigration :

Elle est présentée comme une source de fraternité, ferment de l’internationalisme :

« D’autres, à juste titre, sont en quête d’opportunités pour [elles] et pour leur famille. [Elles] rêvent d’un avenir meilleur et désirent créer les conditions de sa réalisation ».

« Les migrations constitueront un élément fondamental de l’avenir du monde ». Mais, de nos jours, elles doivent compter avec la « perte du ‘‘sens de la responsabilité fraternelle’’, sur lequel est basé toute société civile ».

Il en arrive logiquement à la condamnation d’un nationalisme mal décrit, qui correspond en fait à la pathologie xénophobe :

« Paradoxalement, certaines peurs ancestrales n’ont pas été surmontées par le développement technologique ; au contraire, elles ont su se cacher et se renforcer derrière les nouvelles technologies. »

Sus, donc, aux attardés.

Puis à la suite du constat du mépris des humbles (pauvres/handicapés/personnes âgées) qui caractérise nos sociétés, on aboutit à nouveau à la condamnation de ce « racisme », très éloigné de celui condamné par Pie XI.

Ecoutons donc Pie XI dans Mit Brennender Sorge, remettant toutes choses dans un ordre mesuré :

« Quiconque prend la race, ou le peuple, ou l’Etat, ou la forme de l’Etat, ou les dépositaires du pouvoir, ou toute autre valeur fondamentale de la communauté humaine — toutes choses qui tiennent dans l’ordre terrestre une place nécessaire et honorable, — quiconque prend ces notions pour les retirer de cette échelle de valeurs, même religieuses, et les divinise par un culte idolâtrique, celui-là renverse et fausse l’ordre des choses créé et ordonné par Dieu : celui-là est loin de la vraie foi en Dieu et d’une conception de la vie répondant â cette foi. »

Et plus loin :

« Nul ne songe, certes, à barrer la route qui doit conduire la jeunesse allemande à la constitution d’une vraie communauté ethnique, dans le noble amour de la liberté, l’inviolable fidélité à la patrie. Ce contre quoi nous nous élevons, et nous devons nous élever, c’est l’antagonisme volontairement et systématiquement suscité entre ces préoccupations d’éducation nationale et celles du devoir religieux. »

Puis toujours dans la même encyclique :

« Sur la foi en Dieu, gardée intacte et sans tache, repose la moralité de l’humanité. Toutes les tentatives pour ôter à la morale et à l’ordre moral le fondement, solide comme le roc, de la foi et pour les établir sur le sable mouvant des règles humaines, conduisent tôt ou tard individus et sociétés à la ruine morale. L’insensé qui dit dans son cœur : il n’y a pas de Dieu, marchera dans les voies de la corruption morale. Le nombre de ces insensés, qui aujourd’hui entreprennent de séparer moralité et religion, est devenu légion. Ils ne volent pas ou ne veulent pas voir que bannir le christianisme confessionnel, c’est-à-dire la conception claire et précise du christianisme, de l’enseignement et de l’éducation, de l’organisation de la vie sociale et publique, c’est aller à l’appauvrissement spirituel et à la décadence. Aucune puissance coercitive de l’Etat, aucun idéal purement humain, si noble et si élevé soit-il en lui-même, ne sera jamais capable de remplacer en fin de compte les suprêmes et décisives impulsions que donne la foi en Dieu et au Christ. » « La « foi » consiste à tenir pour vrai ce que Dieu a révélé et propose par son Eglise à la croyance des hommes. C’est la conviction solide des choses invisibles. »

C’est magnifique d’équilibre et de justesse, il n’y a pas d’antagonisme dans la pensée du Pape car elle est ordonnée à la Charité de l’amour de Dieu qui nous fait aimer le prochain. Amour basé sur la justice et la quête de la sainteté. L’identité nationale caractérisée entre autres par l’identité ethnique est admise dans l’ordre des choses. Bergoglio occulte cela.

Pour Bergoglio, si le monde se porte mal, c’est parce que les droits humains ne sont pas assez universels ! Les droits de Dieu sur les hommes et Ses commandements sont oubliés.

A noter qu’il utilise le terme de « droits humains » plus équivoque que le terme de droits de l’homme condamnés par l’Eglise et il fait clairement référence à la déclaration de 1948 de l’ONU.

La manœuvre est subtile et tordue, car il essaye ainsi de se relier avec cette notion au magistère qui nous dit à travers Pie XI que « l’homme, en tant que personne, possède des droits qu’il tient de Dieu et qui doivent demeurer vis-à-vis de la collectivité hors de toute atteinte qui tendrait à les nier, à les abolir ou à les négliger. » les droits dont il s’agit ici sont des droits permettant d’exercer son devoir de Chrétien, donc rien à voir avec les droits de l’homme.

Pie XI, du haut de sa chaire, met Bergoglio en garde sur sa manière d’être et de penser lorsqu’il écrit :

« Là, au contraire, où le zèle réformateur n’a pas jailli de la pureté personnelle, mais était l’expression et l’explosion de la passion, il a troublé au lieu de clarifier, détruit au lieu de construire, et il a été plus d’une fois le point de départ d’aberrations plus fatales que les maux auxquels il comptait ou prétendait remédier. »

Après la fête du Christ-Roi de dimanche dernier, voici une image sur laquelle méditer. Que les puissants d’ici-bas se soumettent à la bonté Divine.

A bientôt pour le chapitre suivant.

LOUIS DAVID

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3 commentaire

  1. Pourriez-vous faire en sorte que l’on puisse imprimer vos textes, en mettant une icône d’une imprimante sur votre page, pour ceux qui voudraient les conserver?

    1. Bonsoir à vous, il vous est possible d’imprimer facilement n’importe quelle page web en tapant CRTL+P sur votre clavier.

      1. Bonjour,

        Ce que dit souvent l’Eglise catholique au monde contemporain, encore plus depuis la lettre encyclique Laudato si, de François, en 2015, que depuis le Discours de Paul VI à l’ONU et la publication de la Constitution « pastorale » Gaudium et spes, de Vatican II, en 1965, est en effet à peu près ce qui suit :

        « Bonsoir à vous, il vous est possible d’imprimer facilement en vous tel ou tel élément de la volonté de Dieu, et d’exprimer, en dehors de vous, tel ou tel élément de la vocation de l’homme, en tapant : « intérêt général, droits de l’homme, individu contemporain, consensus culturel et sociétal et valeurs contemporaines » sur votre clavier. »

        La phrase qui précède, et qui figure entre guillemets, constitue, évidemment, une boutade, une boutade introductive aux quelques mots qui suivent : il me semble en effet que, depuis le début des années 1960, les hommes d’Eglise sont à la recherche d’une conciliation, par nature équivoque et chimérique,

        – entre la conception catholique, orthodoxe et réaliste, du bien commun, de la loi naturelle, de la personne humaine, de la recherche de la vérité en vue de l’adhésion à la vérité et des vertus chrétiennes,

        – et telle conception dominante, anti ou post chrétienne, de l’intérêt général, des droits de l’homme, de l’individu contemporain, de la soumission au consensus culturel et sociétal et des valeurs contemporaines.

        Les mêmes hommes d’Eglise ne semblent pas toujours voir, ou ne semblent pas tous savoir

        – que cette conciliation est contre nature, notamment parce que l’Eglise catholique est enseignante, et n’a pas à se mettre à l’écoute du monde contemporain au point de se mettre à l’école du monde contemporain, au risque de devenir une Eglise écoutante « post-enseignante »,

        – que la poursuite de la recherche de cette conciliation nuit à l’Eglise catholique, en tant qu’Eglise du Christ, et non au monde contemporain, en tant que continuateur des Lumières qui ont incité à (se) détourner de Jésus-Christ, en plein accord avec les fondamentaux de ces Lumières,

        et

        – que si le monde occidental fonctionne, notamment, à l’apostasie et à l’idolâtrie, ce n’est pas du tout en dépit de ce qu’il y a de meilleur, ou de moins mauvais, dans telle conception dominante de l’intérêt général, des droits de l’homme, de l’individu contemporain, du consensus culturel et sociétal et des valeurs contemporaines, mais c’est bel et bien en raison de ce qu’il y a dans telle conception dominante de l’intérêt général, des droits de l’homme, de l’individu contemporain, du consensus culturel et sociétal et des valeurs contemporaines.

        En d’autres termes, si, à partir du début des années 1960, les hommes d’Eglise étaient restés fidèles à une conception « contrapositionnelle ad extra » du bien commun, de la loi naturelle, de la personne humaine, de la recherche de la vérité en vue de l’adhésion à la vérité et des vertus chrétiennes, les catholiques auraient beaucoup moins perdu de vue ceci :

        – la conception catholique, orthodoxe et réaliste, du bien commun et de la loi naturelle est une chose, alors que telle conception dominante de l’intérêt général et des droits de l’homme, qu’il s’agisse d’une conception plutôt individualiste, plutôt collectiviste, plutôt productiviste ou plutôt écologiste, est une tout autre chose ;

        – la conception catholique, orthodoxe et réaliste, de la personne humaine et de la recherche de la vérité en vue de l’adhésion à la vérité est une chose, tandis que telle conception dominante, qu’elle soit hédoniste ou humaniste, de l’individu contemporain et de la soumission au consensus culturel et sociétal, est une tout autre chose ;

        – la conception catholique, orthodoxe et réaliste, non seulement des vertus de tempérance, de force, de justice, de prudence, mais aussi et surtout des vertus chrétiennes : la foi, l’espérance, la charité, est une chose, alors que telle conception dominante culturellement et sociétalement correcte, ou médiatiquement et mondialistement correcte des valeurs contemporaines, dont l’écolo-gauchisme, l’égalitarisme, l’homosexualisme et l’immigrationnisme, est une tout autre chose.

        Tout ce qui précède permet de préciser ou de rappeler quel est le problème, avec la nouvelle doctrine sociale de l’Eglise, à laquelle nous avons droit au moins depuis le milieu des années 1960, avec Gaudium et spes et avec Populorum progressio : quand des papes recourent à des argumentaires et à un vocabulaire non explicitement ni spécifiquement catholiques pour décrire ou évoquer les problèmes du monde contemporain et pour prescrire ou suggérer des solutions au monde contemporain, ont-ils toujours bien conscience du fait qu’ils s’exposent fréquemment au risque de le faire dans le cadre d’une sécularisation interne de leur regard, de leur discours et de leurs valeurs, particulièrement préjudiciable au maintien en vigueur du caractère chrétien et catholique, en plénitude, du même discours ?

        Ceux qui ne voient pas à quoi il est fait allusion ici n’ont qu’à relire telle ou telle lettre encyclique écrite entre 1978 et 1958 et relative à la doctrine de l’Eglise en matière économique ou en matière politique, juste avant de relire Laudato si ou Fratelli tutti, et ils verront s’ils sont seulement en présence d’une différence de forme ou s’ils sont avant tout en présence d’une différence de fond entre ces deux « corpus »…

        Bonne journée.

        Un lecteur.

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