Marie, cette âme sainte et divine, est en l’Église ce que l’aurore est au firmament ; elle précède immédiatement le soleil, mais elle est plus que l’aurore, car elle ne le précède pas seulement : elle le doit porter et enfanter au monde et donner la Vie, le Salut, la Lumière à l’univers, et y produire un Soleil levant, dont celui qui nous éclaire n’est que l’ombre et la figure. La terre, qui méconnaît Dieu, méconnaît aussi cet ouvrage de Dieu en la terre. Marie naît à petit bruit, sans que le monde en parle et sans qu’Israël même y pense, bien qu’elle soit la fleur d’Israël et la plus éminente de la terre. Mais si la terre n’y pense pas, le ciel la regarde et la révère comme celle que Dieu a fait naître pour un si grand sujet, et pour rendre un si grand service à sa propre personne, c’est-à-dire pour le revêtir un jour d’une nouvelle nature. Et ce Dieu même qui veut naître d’elle, l’aime et la regarde en cette qualité. Son regard n’est pas alors sur les grands, sur les monarques que la terre adore; mais le premier et le plus doux regard de Dieu en la terre est vers cette humble Vierge que le monde ne connaît pas : c’est alors la plus haute pensée que le Très-Haut ait sur tout ce qui est créé. Il la regarde, la chérit, la conduit comme celle à qui il veut se donner soi-même, et se donner à elle en qualité de Fils, et la rendre sa Mère. Ainsi soit-il.
Cardinal Pierre de Bérulle, Vie de Jésus, tome 8, p. 221