Certains détails sur la vie de Romain le Mélode sont fournis par le Menaion du mois d’octobre qui rappelle comment il reçut son don pour l’hymnographie2. Il est mentionné par le poète saint Germanos au viiie siècle et on le retrouve dans la Souda sous le nom de « Romanos le Mélode ». Saint Romain est fêté le 1er Octobre par l’Eglise catholique.
On sait qu’il naquit dans une famille juive d’Émèse (aujourd’hui Homs en Syrie) et qu’il fut baptisé alors qu’il était encore enfant (on ignore toutefois si toute la famille se convertit). Il déménagea par la suite à Bérytos (l’actuelle Beyrouth au Liban) où il fut ordonné diacre de l’église de la Résurrection. Peu de temps après, il devait s’installer à Constantinople où il occupa le poste de sacristain dans « la Grande Église » (Sainte-Sophie), tout en résidant au monastère de Kyros où il demeura jusqu’à la fin de sa vie et où il fut enterré auprès de son disciple, saint Ananias.
Si les dates de sa naissance et de sa mort sont exactes, il aurait vécu sous les règnes des empereurs Anastase Ier (491–518) et Justinien Ier (527-565) qui composa lui-même de nombreuses hymnes et aurait été le contemporain de deux autres hymnographes réputés, Anastasios et Kyriakos.
On dit que Romain composa plus de 1 000 hymnes ou kontakia devant être chantées à diverses fêtes religieuses ou anniversaires des saints du calendrier liturgique. Seules 85 nous sont parvenues, dont une soixantaine sont probablement authentiques.
Selon la légende, rien ne le prédisposait à cette tâche. Doué d’une mauvaise voix, il n’arrivait pas à lire en public sans déclencher les moqueries de ses confrères. Or, vers 518, alors qu’il était en devoir dans l’église de la Panagia aux Blachernes, il s’endormit durant l’office de la vigile de la Nativité peu avant de faire la lecture du Livre des Psaumes. Pendant son sommeil, la Très Sainte Vierge Marie lui apparut en songe tenant un rouleau qu’elle lui ordonna de manger. Il se réveilla aussitôt, reçut la bénédiction du patriarche et monta à l’ambon où il improvisa son hymne la plus célèbre, le kontakion de la Nativité, éblouissant l’empereur, le patriarche, le clergé et la foule des fidèles tant par la profondeur des idées théologiques que contenait l’hymne que par la qualité de la voix et du chant de l’interprète.
La tradition veut qu’il s’agisse du premier kontakion (κοντάκιον) jamais chanté. Jusqu’au xiie siècle, il était chanté chaque année au banquet qu’offrait l’empereur lors de la fête de la Nativité par les chœurs de Sainte-Sophie et des Saints-Apôtres de Constantinople, réunis pour l’occasion. Il se présente sous forme d’un dialogue entre la Mère de Dieu et les Mages venus visiter l’enfant nouvellement né, visite que l’on célèbre selon le rite byzantin le 25 décembre et le 6 janvier selon le rite romain.
Parmi les autres kontakia qui lui sont attribués, les plus connus sont :
- le martyre de saint Étienne ;
- la mort d’un moine ;
- le Jugement dernier ;
- le Fils prodigue ;
- la résurrection de Lazare ;
- la plainte d’Adam ;
- la trahison de Judas.
Bien que la plupart de ses kontakia portent sur des sujets religieux rappelant des histoires de l’Ancien Testament ou du Nouveau Testament ou ayant rapport à la vie du saint que l’on célébrait ce jour-là, Romain a aussi pris pour thèmes divers sujets contemporains comme la sédition Nika dans l’hymne « Sur le tremblement de terre et le feu » ou la reconstruction de Sainte-Sophie dans « Le nouveau Salomon » (allusion à Justinien Ier).
Ces kontakia sont écrits dans la koinè atticisante, c’est-à-dire dans une langue populaire mais de niveau élevé où abondent les expressions sémitisantes, ce qui confirmerait les origines juives du compositeur. Des images choisies avec soin, des métaphores frappantes, des comparaisons fortes, des antithèses saisissantes, la création de nouvelles expressions et une dramatisation vivante des sujets caractérisent son style.