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La Contre-Révolution en Alsace entre 1789 et 1799

Il est malaisé de dégager, parmi la population strasbourgeoise, ceux qui refusaient en bloc les idées de la Révolution et surtout ceux qui luttaient contre ces idées. En 1793, les chefs religieux, civils et militaires de la contre-révolution ont quitté la ville pour la rive droite du Rhin, et particulièrement Ettenheim, où se tient le cardinal de Rohan. Les partisans de l’Ancien Régime, demeurés à Strasbourg, sont trop isolés et trop dépourvus de moyens pour constituer une force sérieuse. L’homme de Loi, Louis Rumpler, peut être considéré comme le type même du contre-révolutionnaire. Il est l’auteur d’un pamphlet aussi remarquable dans le fond que dans la forme, où il demande à ses concitoyens de réfléchir sur ce que la Révolution leur a apporté. Avec une ironie grinçante à la bureaucratie envahissante, aux atteintes à la liberté individuelle, à la fiscalité excessive et à l’émancipation des juifs. Les atteintes à la liberté religieuse constituent le thème de nombreux pamphlets. […] En fait, c’est toute l’Alsace qui est suspecte aux yeux des envoyés de la Convention. […]

Les exemples de rébellion de la population contre la politique de la Convention, sont nombreux et témoignent de l’exaspération des esprits chez ceux qui refusent de la subir passivement. Rosheim, que nous avons vu accueillir avec ferveur les prêtres réfractaires, entre en ébullition en août 1792. Une véritable bataille de rue oppose les habitants armés de faux, de fourches, de sabres et de quelques fusils à 900 volontaires lorrains qui sont mis à mal. L’arrivée des renforts donne le signal du pillage des habitations. Tout près de là, à Molsheim, des événements graves se déroulent en mars 1793. Depuis plusieurs mois, l’exaspération née de la persécution religieuse, y est à son comble. La levée de 300000 hommes servit de détonateur. Formé dans les villages environnants, un groupe de quatre à cinq cent personnes, vient faire sa jonction avec des conjurés locaux, au total près de 700.

Contrairement à l’affaire de Rosheim, il est très probable que l’émeute de Molsheim ait été préparée par des émissaires des chefs de la contre-révolution réfugiés sur la rive droite du Rhin. A Rouffach, les émeutes se succèdent. Déjà, en 1791, l’enlèvement des vases et objets du culte de l’église des Récollets avait déclenché le tumulte. Les habitants exercent des violences à l’égard des acheteurs de biens ecclésiastiques et même de domaines seigneuriaux. En 1792, une soixantaine d’émeutiers s’en prend au château où siège la municipalité. Le nouveau maire républicain et un officier municipal sont tués. Le lendemain, la foule met le château et les maisons des patriotes au pillage. Des scènes identiques se produisent au même moment à Hochstatt. Les habitants de Turckheim, exaspérés par l’attitude de leur curé constitutionnel Poujol, se saisissent de lui et de ses partisans et les emprisonnent. A la nouvelle qu’un détachement de volontaires républicains, venu de Colmar, va mettre les mutins au pas, la vallée de Munster s’émeut et envoie une troupe armée à la rescousse.

LA CONTRE-RÉVOLUTION EN ALSACE (1789-1799) in Roland Oberlé, Michel Perronet, La révolution en Alsace, éditions Horwarth, 1989.

Source : Lettres de Strasbourg

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