Certains apologistes, par exemple le rabbin converti Drach au xixe siècle, eurent soin de distinguer explicitement entre bonne et mauvaise kabbale. Mais, avec un peu de bonne volonté, ne pourrait-on pas dégager aussi quelques bons éléments dans le soufisme musulman ou même dans la gnose des premiers siècles de l’ère chrétienne, ces deux pendants de la kabbale ? Les quelques conversions de Juifs qui se sont produites à l’occasion de la kabbale ne doivent être considérées que comme d’heureux accidents. Il n’en reste pas moins que la kabbale est une doctrine essentiellement malsaine, comme le reconnaissent du reste les meilleurs esprits du judaïsme, non seulement par la doctrine panthéiste qui en fait le fond, mais encore par ses procédés antirationnels qui vont à fausser la rectitude des facultés humaines. Il faut louer les intentions généreuses qui ont poussé quelques chrétiens et surtout des Juifs baptisés à chercher des arguments apologétiques dans la kabbale et en particulier dans le Zohar. Mais pour généreuse qu’elle est, cette méthode part d’une illusion dangereuse. Toute démonstration rationnelle de la vérité du christianisme ordonnée à la conversion des Juifs croyants doit reposer sur le terrain commun de la philosophia perennis et des vérités admises dans les deux croyances : possibilité et existence du surnaturel, Révélation, Prophétie, promesse messianique, etc. La kabbale, fausse dans sa doctrine philosophico-religieuse, dangereuse par ses procédés antirationnels, malsaine par le relent d’érotisme qui s’en dégage […] est certainement en dehors de ce terrain commun.
Père Paul Joüon, extrait de l’article « Kabbale » in Dictionnaire apologétique de la foi catholique contenant les preuves de la vérité de la religion catholique et les réponses aux objections tirées des sciences humaines, Tome 2, 4e éd., Paris, G. Beauchesne, 1911-1931.
Le père Paul Joüon (1871-1940), était un jésuite exégète, professeur d’hébreu biblique, spécialiste en philologie sémitique. Il enseigna notamment à l’université Saint-Joseph de Beyrouth.
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