Le zèle pour la Foi, la dévotion fervente et l’amour compassionnel doit susciter le cœur des fidèles, de manière à ce que tous ceux qui se glorifient du nom de chrétien, tous ceux dont le cœur brûle de colère face aux insultes faites à leur Rédempteur, se soulèvent complètement et vigoureusement en défense de la Terre Sainte et pour le soutien de la cause de Dieu. Empli de la lumière de la vraie Foi et songeant avec une affection filiale aux merveilleuses faveurs que Notre Sauveur a conféré à la race humaine sur la Terre Sainte, qui ne brûlerait pas de dévotion et de charité ? Qui ne se lamenterait pas sur le sort de cette Terre Sainte, qui est une part de l’héritage du Seigneur ? Quel cœur ne serait pas touché de compassion pour elle, en raison des si nombreuses preuves d’amour, données par Notre Créateur sur cette terre ? Hélas ! Cette même terre sur laquelle le Seigneur a daigné faire opérer notre salut et sur laquelle, afin de racheter l’humanité en payant le prix de Sa mort, Il a été consacré dans Son propre Sang, cette terre a été attaquée sans scrupule et occupée pendant une longue période par les ennemis impies du nom chrétien : les mécréants et blasphémateurs Sarrazins [mahométans]. Non seulement ils ont impudemment conservé leur conquête, mais aussi, ils la livrent sans vergogne au chaos. Là, offensant le Créateur de la plus grande manière, ils massacrent sauvagement le peuple chrétien, outrageant et affligeant tous ceux qui professent la foi catholique. « Où est le Dieu des chrétiens ? » : telle est la phrase que lancent les Sarrazins, afin de les narguer. De tels scandales, que l’esprit ne peut concevoir et que la langue ne peut raconter, ont enflammé Notre cœur et suscité Notre courage, afin que Nous, qui avons non seulement eu le rapport de ces événements, mais qui avons aussi vu de Nos yeux et touché de Nos mains, puissions Nous lever afin de venger, autant que nous le pouvons, l’insulte faite au Crucifié. Notre aide viendra de ceux qui sont enflammés par le zèle de la Foi et par la dévotion. Parce que la libération de la Terre Sainte concerne tous ceux qui professent la Foi catholique, Nous avons convoqué un concile, afin qu’après consultation auprès des prélats, des rois, des princes et autres hommes sages, Nous puissions décider et ordonner, en Christ, la libération de la Terre Sainte. Nous avons également proposé d’exhorter les grecs à revenir dans l’unité de l’Eglise : s’efforçant avec orgueil de tenter de déchirer la Tunique sans couture du Seigneur, ils se sont retranchés hors de la dévotion et de l’obéissance due au Siège apostolique. Nous avons également prévu une réforme des mœurs, lesquelles sont devenues corrompues à cause des péchés du clergé et du peuple. Dans tout ce que Nous avons mentionné, Celui pour qui rien n’est impossible dirigera Nos actes et conseils. Quand Il le veut, Il rend facile ce qui est difficile, et par Son pouvoir, Il nivelle les sentiers tordus et rend les chemins droits. En effet, afin que Nos plans prennent effet au plus vite et ayant considéré les risques des guerres et les dangers liés aux déplacements de ceux que Nous avons souhaité convoquer au concile, Nous n’avons épargné ni Notre personne, ni nos frères, mais avons affronté les difficultés afin de pourvoir à la paix des autres. Nous sommes venus dans la ville de Lyon avec Nos frères et avec la curie, estimant qu’en ce lieu, ceux convoqués au concile pourraient s’y rendre en courant moins de risques et en occasionnant moins de dépenses. Nous sommes venus, affrontant divers dangers et inquiétudes, courant bien des risques, là où ceux convoqués au concile se sont assemblés, soit en personne ou par le biais de représentants appropriés. Nous avons eu de fréquents entretiens avec eux, concernant l’aide à apporter à la Terre Sainte, et pleins de zèle pour venger les insultes faites à Notre Seigneur, ils ont réfléchi aux meilleurs moyens de secourir ladite terre et ont fourni conseils et avis, comme il est de leur devoir.
Ayant écouté leurs conseils, Nous louons à juste titre leurs résolutions et leur enthousiasme pour la libération de la Terre Sainte. Toutefois, de peur que Nous ne semblions charger d’autres épaules de lourds fardeaux, durs à supporter, Nous commencerons par Nous-même, déclarant que tout ce que Nous possédons, Nous le tenons du Fils unique de Dieu, Jésus-Christ, par les grâces Duquel Nous vivons, par les faveurs Duquel Nous subsistons, par le Sang Duquel Nous avons été rachetés. Nous et Nos frères, les cardinaux de la Sainte Eglise Catholique, donnerons entièrement, pour six années consécutives, un dixième de tous nos revenus ecclésiastiques pour l’aide à la Terre Sainte. Avec l’approbation de ce saint concile, Nous décrétons et ordonnons que pour les six ans susdits, commençant dès la prochaine fête de la naissance de Saint Jean Baptiste, tout ecclésiastique, de quelque rang ou prééminence, condition, ordre ou état religieux –et Nous désirons qu’aucun d’entre eux n’invoque pour lui-même ou pour son église quelque privilège ou indult que ce soit, peu importe les formulations ou expressions par lesquelles ces privilèges ou indults furent accordés, et au contraire, nous suspendons tous privilèges et indults que Nous avons accordé jusqu’à maintenant- devra payer entièrement et sans aucune réduction, un dixième de tous ses revenus ecclésiastiques annuels de la manière suivante : une moitié à la fête de la Nativité de Notre Seigneur, et une autre moitié à la fête de Saint Jean Baptiste. Afin de mieux veiller à la révérence due à Celui pour Qui tout ceci est entrepris, en Lui-Même, en Ses saints et tout spécialement en la Très Sainte Vierge Marie auprès de laquelle Nous demandons intercession pour ceci et pour Nos autres nécessités, et afin d’obtenir de larges subsides pour la Terre Sainte, Nous ordonnons que la constitution du pape Grégoire, Notre prédécesseur, d’auguste mémoire, contre les blasphémateurs, soit inviolablement observée. Les amendes prévues dans cette constitution devront être prélevées en totalité par les autorités des lieux où des blasphèmes seront perpétrés, ainsi que par ceux qui y possèdent une juridiction temporelle. Si nécessaire, des mesures coercitives devront être prises par les ordinaires diocésains et locaux. L’argent devra être assigné aux collecteurs des subsides. De plus, nous ordonnons de manière stricte à ceux qui entendent les confessions par juridiction ordinaire ou par privilège, d’ordonner et d’enjoindre leurs pénitents à faire don de leur argent à la Terre Sainte en pleine rémission de leurs péchés. Les confesseurs devront convaincre de faire don, proportionnellement à leurs moyens, de quelques-uns de leurs biens, pour l’aide à la Terre Sainte. Nous ordonnons également que dans chaque église soit placée une boite pouvant être ouverte par trois clés. La première clé devra être détenue par l’évêque, la seconde par le prêtre de l’église et la troisième par une honnête personne laïque. Il devra être indiqué aux fidèles de placer leurs dons, selon ce que le Seigneur leur inspirera, dans cette boite, en rémission de leurs péchés. En plus de ces mesures, afin de pourvoir encore davantage de moyens à la Terre Sainte, nous exhortons et pressons les rois, princes, marquis, comtes, barons, magistrats, gouverneurs et autres chefs séculiers à faire en sorte que dans les territoires soumis à leur juridiction, chaque fidèle paye une pièce d’une valeur d’un tournois ou d’un sterling, selon les coutumes et circonstances de l’endroit, et qu’ils mettent en place une autre taxe minime, taxe qui doit être de nature à ne pas être une charge excessive pour quiconque, en rémission de leurs péchés. Ces contributions doivent être réalisées chaque année, pour l’aide à la Terre Sainte, de manière à ce que personne ne puisse se dire étranger à la compassion due à l’état lamentable de la Terre Sainte et afin que personne ne puisse se dire exempté de contribuer ou empêché d’un tel mérite. Aussi, de crainte que ces sages dispositions relatives aux subventions pour la Terre Sainte ne soient ruinées par la fraude, la malice ou la manigance de tel ou tel, Nous excommunions et anathémisons quiconque portera atteinte, directement ou indirectement, publiquement ou secrètement, au paiement, décrit ci-dessus, des dimes réservées à l’aide de la Terre Sainte.
De plus, puisque des corsaires et des pirates menacent grandement ceux qui voyagent vers ou depuis cette terre, en les capturant ou en les pillant, Nous les excommunions eux et leurs principaux complices et soutiens. Nous interdisons à quiconque, sous peine d’anathème, d’entrer sciemment en contact avec eux pour contracter achat ou vente. Nous ordonnons aussi aux chefs des cités et gouverneurs de territoires, d’empêcher et de dissuader de telles personnes de commettre ces iniquités. Sans quoi, Nous désirons que les prélats des églises emploient la sévérité ecclésiastiques dans leurs régions. De plus, nous excommunions et anathémisons ces impies, ces faux chrétiens qui, s’opposant au Christ et à la chrétienté, fournissent armes et fers aux Sarrazins, lesquels sont utilisés pour attaquer les chrétiens, ainsi que du bois pour leurs galères et navires. Nous décrétons que ceux qui vendent aux Sarrazins des galères et des navires, et ceux qui s’emploient comme pilotes sur les navires de pirates Sarrazins, ou leur fournissent quelque aide ou conseil ou quoique ce soit au détriment des chrétiens, et tout spécialement au détriment des chrétiens de la Terre Sainte, seront punis par la confiscation de leurs biens et deviendront les esclaves de ceux qui les captureront. Nous ordonnons que cette sentence soit renouvelée publiquement les dimanches et jours saints dans les villes portuaires, et que l’Eglise ne soit pas ouverte à de telles personnes avant qu’ils ne fassent don à l’aide à la Terre Sainte de tout ce qu’ils ont obtenu par ce commerce maudit, plus l’équivalent de cette somme sur leur propre fortune, afin qu’ils soient punis en proportion de leurs péchés. S’il advenait qu’ils ne payent point, ils devront être châtiés par d’autres moyens afin que par leur châtiment, d’autres soient dissuadés de se livrer à de semblables actes impudents. En sus, Nous prohibons et Nous interdisons à tous les chrétiens, sous peine d’anathème, pour six ans, d’envoyer ou de conduire leurs navires dans les territoires des Sarrazins qui résident dans l’Orient, afin que ces navires soient mis à la disposition de ceux qui désirent se rendre en Terre Sainte et afin que les Sarrazins soient privés de l’aide considérable qu’ils se sont habitués à obtenir par ces voies. Parce qu’il est de la plus haute nécessité, pour la réussite de cette entreprise, que les dirigeants et les peuples chrétiens soient en paix les uns avec les autres, Nous ordonnons donc, avec l’approbation de ce saint synode général, que la paix soit globalement maintenue parmi les chrétiens du monde entier et que ceux qui se trouvent en conflit soient tenus par les prélats des églises, à observer inviolablement, pendant six ans, un accord définitif, un traité de paix ou une trêve. Ceux qui refuseront de se plier à cela y seront contraints de la plus stricte des manières au moyen d’une sentence d’excommunication contre leur personne ou par un interdit sur leur territoire, à moins que la méchanceté des malfaiteurs soit si grande qu’ils ne puissent jouir de la paix. S’il advenait qu’ils prennent légèrement la censure ecclésiastique, ils auront mérité de redouter que l’autorité ecclésiastique invoque le pouvoir séculier contre eux comme perturbateurs de l’entreprise de Celui qui fut crucifié. Ainsi, ayant confiance en la miséricorde du Tout-Puissant et en l’autorité des bienheureux apôtres Pierre et Paul, par le pouvoir de lier et de délier que Dieu Nous a conféré, bien qu’indignes : à tous ceux qui entreprendront de traverser la mer pour aller secourir la Terre Sainte, en personne et à leurs propres frais, Nous accordons le plein pardon de leurs péchés pour lesquels ils sont pleinement et de tout cœur contrits, dont ils ont parlé en confession et Nous leur promettons l’élévation à la vie éternelle au moment de la rétribution des justes. À ceux qui ne se rendront pas en Terre Sainte en personne, mais qui y enverront à leurs propres frais des hommes convenables, selon leurs moyens et leurs positions, et de même, à ceux qui s’y rendent en personne, mais aux frais d’autres personnes, Nous accordons le plein pardon de leurs péchés. Nous voulons accorder et partager cette rémission, selon la nature de leur aide et l’intensité de leur dévotion, à tous ceux qui contribueront, par leurs possessions, à l’aide à la Terre Sainte, ou qui fourniront quelque aide ou conseil utile concernant ladite entreprise, et à tous ceux qui mettront leurs navires à disposition pour l’aide à la Terre Sainte ou à ceux qui entreprendront de construire des navires en ce but. Enfin, ce sage et saint synode général confère le bénéfice de ses prières et bénédictions à tous ceux qui participent à cette entreprise, afin que ceci puisse contribuer à leur salut.
Ce n’est pas à Nous, mais c’est au Seigneur que nous rendons gloire et honneur. Remercions-le aussi qu’à l’occasion d’un concile si saint, aient pu répondre à Notre appel un très grand nombre de patriarches, primats, archevêques, évêques, abbés, prieurs, diacres, archidiacres et autres prélats ecclésiastiques, aussi bien en personne ou au moyen de procureurs appropriés, ainsi que les représentants des chapitres, collèges et couvents. Néanmoins, bien que leurs avis soient très utiles pour l’achèvement heureux d’une si grande entreprise et que leur présence, en tant que fils bien-aimés soit un si grand délice qui Nous emplit de joie spirituelle, certains d’entre eux ont quelque difficulté à rester ici plus longtemps. Divers inconvénients résultent de leur présence en grand nombre. Nous ne souhaitons pas qu’ils souffrent plus longtemps d’être étouffés dans une si grande foule et leur éloignement pourrait être dommageable à leurs églises et à eux-mêmes. Une prudence affectueuse Nous conduit, sous le conseil de Nos frères, à alléger le fardeau de ces représentants, tandis que Nous poursuivrons Notre objet avec non moins d’ardeur et de zèle. Nous avons donc décidé que tous les patriarches, primats, archevêques, évêques, abbés et prieurs que nous avons spécifiquement appelés par leur nom devront rester et ne pourront pas quitter le concile sans Notre approbation spéciale. Les autres abbés et prieurs non-mitrés, les autres abbés et prieurs qui n’ont pas été spécifiquement appelés par leur nom, ainsi que les prévôts, diacres, archidiacres et autres prélats, les procurateurs des prélats, chapitres, collèges et couvents, ont Notre gracieuse autorisation à prendre la route, avec la bénédiction de Dieu et de la Notre. Nous demandons à ceux qui prendront la route de laisser ici suffisamment de représentants, comme il est indiqué ci-dessous, pour qu’ils puissent recevoir nos ordres, ainsi que les décrets de ce présent concile et tout autre décret qui pourra être, avec l’inspiration divine, publié dans le futur. Ainsi, tous ceux qui prennent le départ doivent laisser ici un nombre suffisant de représentants, comme suit : quatre pour le royaume de France, quatre pour le royaume d’Allemagne, quatre pour les royaumes d’Espagne, quatre pour le royaume d’Angleterre, un pour le royaume d’Ecosse, deux pour le royaume de Sicile, deux pour la Lombardie, un pour la Toscane, un pour les états de l’Eglise, un pour le royaume de Norvège, un pour le royaume de Suède, un pour le royaume de Hongrie, un pour le royaume de Dacie, un pour le royaume de Bohème, un pour le duché de Pologne. De plus, il est parvenu à nos oreilles que certains archevêques, évêques et autres prélats, lorsqu’ils furent convoqués par Nous à ce concile, ont demandé des contributions excessives auprès de leurs sujets et ont commis de vastes extorsions, leur imposant de lourdes taxes. Certains de ces prélats, bien qu’ayant commis de si grandes extorsions, ne sont pas venus au concile. Puisqu’il n’a jamais été, ni n’est Notre intention que les prélats se rendant au concile associent la vertu d’obéissance à l’oppression de leurs sujets, Nous avertissons tous les prélats, avec une grande fermeté, que personne n’ait l’audace de se servir d’un concile comme prétexte pour opprimer ses sujets par des taxes ou autres exactions. S’il est exact que certains prélats ne sont pas venus au concile tout en ayant imposé de telles exigences sous le prétexte de leur déplacement, Nous désirons et ordonnons expressément qu’ils fassent restitution sans délai. Ceux qui toutefois, ont opprimé leurs sujets, réclamant des contributions excessives, devront faire amende honorable auprès d’eux sans créer de difficultés et devront appliquer Nos ordres, de manière à ce que nous n’ayons pas à employer quelque autre remède par Notre autorité.
Pape Grégoire X, Constitution Zelus Fidei, 2e Concile de Lyon, 7 Mai 1274.
[…] Tous ces illustres saints de l’Ancien Israel furent exaltés et donnés en exemple par le pape Grégoire X dans la constitution « Zelus Fidei ». […]